Compteur Global

jeudi 4 février 2010

Etat des lieux de la contraception et de l’avortement en France

Un rapport dressant l’état des lieux de la contraception et de l’avortement en France a été remis ce mardi à la ministre de la Santé Roselyne Bachelot. En matière de l’éducation à la sexualité , Mme Bachelot compte « mettre le paquet sur l’information en milieu scolaire » en France pour faire reculer le nombre de grossesses indésirées chez les mineures, a-t-elle confié au Parisien.

Alors qu’un rapport sur l’état des lieux de la contraception et de l’avortement lui est remis ce mardi, la ministre de la santé Roselyne Bachelot se dit « frappée d’apprendre que deux tiers des filles de 3e pensent encore qu’on ne peut pas tomber enceinte lors du premier rapport sexuel ».

Etat des lieux de la contraception

Quarante ans après sa légalisation, la contraception est généralisée en France métropolitaine et dans les DOM-TOM. Elle se traduit principalement par l’utilisation de la pilule contraceptive, la stérilisation étant très peu répandue contrairement à beaucoup d’autres pays du Sud ou du Nord. Ces dernières années, la crainte du sida a fait progresser l’usage du préservatif.

Le contrôle des naissances est une question de santé publique de vaste ampleur puisqu’il concerne potentiellement, à un moment ou l’autre de la vie, l’ensemble de la population française. Si on prend en compte la population âgée de 18 à 45 ans, la contraception concerne en France approximativement 32 millions de femmes et d’hommes.


La meilleure contraception - INPES
envoyé par sante-jeunesse-sports.

Une large diffusion de la contraception en 40 ans :

Les méthodes contraceptives ont connu une large diffusion depuis le vote, en 19671, de la Loi Neuwirth, il y a exactement 40 ans. Depuis cette date, la France est devenue un des pays où le taux de contraception, notamment en ce qui concerne les méthodes nécessitant une prescription médicale, est le plus élevé au monde. Seules moins de 5 % des femmes concernées par la contraception n’utilisent aucune méthode contraceptive.

Les dernières données disponibles permettent de faire le bilan des pratiques contraceptives près de 30 ans plus tard. Plus de deux femmes sur trois entre 20 et 49 ans (69 %) utilisent une méthode contraceptive. Les autres, qui n’en utilisent pas, ne sont pas pour autant exposées au risque d’une grossesse non désirée : 7% sont stériles – elle ou leur partenaire – de façon naturelle ou parce qu’elles ont subi une opération stérilisante, 11 % n’ont pas de partenaire sexuel, enfin 8% sont enceintes ou cherchent à le devenir. Il ne reste donc que 3% de femmes n’entrant dans aucune des catégories ci-dessus, et disant ne plus vouloir d’enfants et n’utiliser aucune méthode contraceptive.

Une femme sur trois prend la pilule

La pilule est de loin la première méthode contraceptive, avec 36 % d’utilisatrices parmi les femmes d’âge fécond (20-49 ans). La proportion est maximale chez les jeunes de 20-24 ans (59 %) et décroît ensuite régulièrement avec l’âge. Le stérilet occupe la seconde place, avec 16 % d’utilisatrices ; la tendance selon l’âge est ici très différente, avec un maximum entre 35 et 44 ans (près de 27 %). Les autres méthodes n’occupent plus qu’une place restreinte, le préservatif (5 % comme méthode principale) devançant légèrement l’abstinence périodique (4 %) ; le retrait, méthode traditionnelle des couples français jusque dans les années soixante, n’estplus déclaré que par 2% d’entre eux. Pour 100 femmes de 20-49 ans pratiquant une contraception, 56 prennent la pilule, 25 le stérilet et 19 une autre méthode.

D’après les données du Baromètre santé de l’INPES publié en 2005, les méthodes employées sont, par ordre décroissant, la pilule (60,2,4 %), le dispositif intra utérin (20,6 %), le préservatif (10,9 %).. Les méthodes locales sont utilisées par 2,2 % des femmes

Si en 40 ans les méthodes contraceptives ont connu une large diffusion dans la population, elles ont également connu une médicalisation importante. Une « norme médicale contraceptive » s’est peu à peu imposée. Il semble que les médecins privilégient la prescription des méthodes qu’ils jugent très efficaces alors que ces méthodes peuvent ne pas être adaptées aux attentes et au mode de vie des femmes et des couples. En conséquence elles sont moins bien utilisées et donc moins efficaces.

Du fait de l’existence de cette « norme », d’autres méthodes ont été insuffisamment proposées aux femmes et aux couples. Le cas du dispositif intra utérin (stérilet) est particulièrement significatif : Son usage était « réservé » aux femmes plus âgées, ayant eu le nombre d’enfants qu’elles désirent, plutôt comme une « dernière » contraception. Ceci en a longtemps fait une particularité française. La Haute autorité de santé, dans la « stratégie de choix des méthodes contraceptives chez la femme » souligne qu’il s’agit d’une méthode pouvant être proposée aux femmes sans enfant.

Les jeunes utilisent beaucoup le préservatif

Le préservatif est souvent utilisé en association avec une autre méthode contraceptive : au total 7% des femmes et 12 % des hommes de 20 à 49 ans ont déclaré l’utiliser (ou leur partenaire) dans le mois de l’enquête. Ce moyen de contraception s’est largement diffusé depuis 1988, en relation avec l’épidémie de sida. Il est souvent utilisé de façon occasionnelle ou temporaire, principalement par les jeunes et les personnes ne vivant pas en couple, en particulier au début d’une nouvelle relation amoureuse. Le préservatif est ainsi devenu la méthode de contraception la plus fréquente lors des premiers rapports sexuels, la moitié d’entre eux ayant lieu avec préservatif en 1994. La pilule commence souvent quelques mois après, quand la relation amoureuse est stabilisée.

La stérilisation à but contraceptif se pratique très peu

En France, la loi autorisant la stérilisation à but contraceptif n’a été votée qu’en 2001 et le corps médical n’incite pas à ce choix définitif, à la différence de nombreux autres pays (notamment les pays anglo-saxons), où la stérilisation, féminine ou masculine, est la principale méthode de régulation des naissances. Au Canada, par exemple, 42 % des couples d’âge fécond sont stérilisés (l’homme ou la femme) alors qu’en France, ils ne sont que 5 %. Dans la majorité des cas, c’est la femme qui a été stérilisée, souvent à un âge élevé, après 40 ans.

Un paysage contraceptif fortement médicalisé mais des échecs de contraception fréquents

L’étude COCON a permis d’estimer que, pour un tiers des femmes, la dernière grossesse, intervenue dans les cinq dernières années, n’était pas souhaitée. Parmi ces femmes qui n’ont pas choisi leur dernière grossesse, un tiers n’utilisait pas de contraception. Mais, phénomène préoccupant, près de deux grossesses non prévues sur trois surviennent chez des femmes qui déclarent utiliser un moyen contraceptif au moment de la survenue de la grossesse. La moitié de ces grossesses non souhaitées se termine par une IVG. Les chercheurs qualifient de paradoxale cette situation qui associe à une large diffusion des méthodes contraceptives, une stabilité du nombre des interruptions volontaires de grossesse.

L’analyse des données traduit les difficultés auxquelles sont confrontées les femmes dans la gestion, quotidienne et à long terme, d’une contraception très médicalisée. Elles attribuent les « échecs » du moyen contraceptif qu’elles utilisent au fait qu’elles n’ont pu choisir la méthode qui leur a été prescrite, et que celle-ci ne leur convient pas. Elles évoquent également une utilisation incorrecte de la méthode ou la survenue d’une difficulté lors de son utilisation : oubli de pilule, mauvaise utilisation ou rupture de préservatif, échec des méthodes naturelles. Elles sont également démunies lorsqu’un accident de méthode survient, car étant insuffisamment informées, elles n’adoptent pas la conduite à tenir adéquate pour éviter la survenue d’une grossesse.

Par ailleurs, pour certains experts (Nathalie Bajos, Unité INSERM-INED, U 569), il existe également une “norme sociale du bon moment pour être mère » et cette norme s’est renforcée. En effet, l’âge moyen des femmes au moment de la naissance de leur enfant ne cesse de reculer : il atteint presque 30 ans en 20063. : Le « bon moment pour être mère » nécessite d’avoir une relation stable, un logement, une situation professionnelle pour soi et son conjoint, or les études sont de plus en plus longues. Ces raisons expliquent en partie que les femmes recourent plus fréquemment et plus facilement à une IVG en cas de grossesse non désirée qu’avant, notamment chez les plus jeunes.

Une adaptation constante des dispositifs législatifs

La loi du 28 décembre 1967, présentée par le médecin et député Lucien Neuwirth, constitue l’acte fondateur de la libéralisation de la contraception en France. Depuis cette date, le cadre législatif a été assoupli à plusieurs reprises afin de prendre en compte les évolutions de la société française.

La dernière modification législative dans ce domaine concerne la loi n° 2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique. Parmi les 100 objectifs de santé publique elle a retenu l’objectif n° 97 « Assurer l’accès à une contraception adaptée, à la contraception d’urgence et à l’interruption volontaire de grossesse (IVG) dans de bonnes conditions pour toutes les femmes qui décident d’y avoir recours »). La loi autorise également les sagesfemmes à prescrire une contraception hormonale dans les suites d’une naissance et dans celles d’une interruption volontaire de grossesse.

Des recommandations pour faire évoluer la pratique des prescripteurs

Dès 2004, la Direction générale de la santé a demandé à la Haute Autorité de Santé (HAS) d’émettre une recommandation de pratique clinique en matière de contraception. Le document intitulé « Stratégies de choix des méthodes contraceptives chez la femme ».

Destiné aux professionnels de santé, ce document établit notamment un état des connaissances sur les méthodes contraceptives actuellement disponibles. La recommandation s’appuie sur l’idée centrale que pour être bien acceptée et bien utilisée, une méthode contraceptive doit être adaptée à la vie affective et sexuelle de chaque femme. Elle présente des arguments en faveur de l’aide au choix par la femme de sa méthode contraceptive, et préconise d’y associer le couple. Elle propose enfin des modèles d’accompagnement permettant au médecin d’amener la femme et le couple à choisir leur contraception.

Sur la base de l’état des lieux et des recommandations disponibles, la Direction générale de la santé a élaboré une stratégie d’actions en matière de contraception5, qui repose sur quatre axes. Le premier axe vise à améliorer l’information du grand public et de publics cibles - adolescents, notamment sortis du milieu scolaire, population des DOM -, ainsi que professionnels de santé. La campagne « la meilleure contraception, c’est celle que l’on choisit » s’inscrit dans ce cadre. En outre, des messages d’information sur les méthodes contraceptives ont été intégrés dans le nouveau carnet de santé de la maternité ainsi que dans le dossier guide IVG remis à chaque femme qui demande une IVG. En effet ces deux situations constituent des périodes de vulnérabilité pour les femmes.

Le second axe vise à agir sur la pratique des professionnels de santé, tout particulièrement les médecins, généralistes et gynécologues, les sages femmes, les pédiatres mais aussi, les pharmaciens et les infirmières scolaires. Des outils sont mis à leur disposition pour les aider à accompagner les femmes et les couples dans leur demande de contraception. C’est le cas des recommandations de pratique clinique intitulées « Stratégies de choix des méthodes contraceptives », des documents de l’INPES (Repères pour votre pratique) et de la création d’une rubrique spécifique sur le site Internet de la campagne.

L’amélioration de l’accès à la contraception, notamment pour les mineur(e)s dans les centres de planification ou d’éducation familiale entre dans le troisième axe de cette stratégie qui invite les professionnels de santé à prendre en compte la situation socio-économique de leurs patientes lors de la prescription d’une méthode contraceptive. Le dernier axe concerne l’amélioration des connaissances en matière d’utilisation des moyens contraceptifs. Une enquête a été menée par la DREES au printemps dernier. Les premiers résultats sont attendus à la fin du premier trimestre 2008. Ils devraient apporter des informations sur la situation contraceptive de femmes ayant recours à une interruption volontaire de grossesse. Enfin une seconde étude sera lancée prochainement6 dans 4 pays européens afin comparer les politiques menées en matière de contraception : Pays-Bas, Suède, Royaume-Uni et Espagne.

Un dispositif de communication pour tous les publics

La contraception s’impose souvent comme une évidence. Rarement questionnée et peu expliquée, elle ne devient sujet qui interpelle que lorsqu’il est « trop tard », qu’il y a eu oubli de pilule, rupture de préservatif, ou tout autre échec dans l’utilisation d’un moyen contraceptif. À partir de ce constat, comment initier une nouvelle « culture contraceptive » qui favorise une meilleure utilisation des différentes méthodes de contraception ? Comment contribuer ainsi à réduire le nombre de grossesses non désirées parmi les jeunes femmes de 20-30 ans, les adolescentes et les femmes en situation de vulnérabilité ?

La campagne menée à la demande du Ministère de la Santé, de la Jeunesse et des Sports par l’Institut National de Prévention et d’Education pour la Santé (INPES) répondra à ces questions : tout d’abord en portant à la connaissance de tous l’existence d’une large palette de méthodes pour aider chaque femme et chaque couple à choisir celle qui lui convient le mieux, ensuite en entraînant différents publics, utilisateurs comme prescripteurs, dans une démarche de choix réfléchi.


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire