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mercredi 3 février 2010

La maltraitance ordinaire dans les hôpitaux liée aux comportements des soignants

altLa maltraitance ordinaire dans les établissements de santé semble liée aux comportements des professionnels mais aussi à l'organisation des établissements de santé, montre une étude commandée par la Haute autorité de santé (HAS) rendue publique mercredi.

La notion de maltraitance ordinaire regroupe des actes de négligence quotidienne comme faire des toilettes trop rapides, ne pas répondre aux appels des personnes, servir des repas trop tôt ou ne pas respecter les rythmes de chacun pour le lever et le coucher.

Pour "cerner ce phénomène et prévenir", la HAS a demandé au cabinet C.Compagnon.Conseil de réaliser une étude sur ce sujet.

Réalisée en 2008, l'étude est fondée sur une analyse qualitative de témoignages de patients et de proches, complétée par des entretiens avec des professionnels. Au total, 59 écrits ont été analysés et des entretiens réalisés avec 23 personnes. Ces témoignages proviennent de personnes hospitalisées ou de leur entourage et relatent le vécu d'hospitalisation dans des établissements de différent type (court séjour, MCO, psychiatrie, etc.).

Les résultats, qui ne sont pas chiffrés mais qualitatifs, mettent en évidence deux types de maltraitance : celle liée aux comportements des professionnels et celle liée à l'organisation d'un établissement de santé.

Concernant les comportements des professionnels, les témoignages recueillis sont nombreux à "dénoncer des attitudes indifférentes, déplacées ou agressives".

Ils font état d'un fonctionnement collectif des professionnels qui paraissent "ignorer la présence même des malades ou de leurs proches". Certains malades soulignent que des professionnels peuvent "avoir tendance à continuer leurs conversations privées en ignorant délibérément les personnes présentes".

Les auteurs ont relevé "souvent le peu de crédit accordé à la parole du malade". Dans ces cas, la maltraitance ordinaire est "étroitement associée à des désagréments physiques, voire une mise en danger des personnes".

L'étude fait état aussi de "pressions psychologiques" qui se traduisent notamment par "des situations d'humiliation, des propos blessants ou des menaces implicites ou explicites". De nombreux témoignages évoquent des humiliations en rapport avec le corps, l'intimité et le besoin d'aller aux toilettes ou d'avoir le bassin.

La maltraitance liée à des facteurs institutionnels

L'étude met en évidence de nombreux cas où "c'est le fonctionnement de l'organisation qui agresse les malades et leurs proches". En règle générale, il est demandé au "patient de s'adapter aux contraintes de l'organisation et non l'inverse".

Les auteurs notent que "l'établissement de santé fonctionne selon des règles implicites connues seulement des professionnels, ou parfois explicitées dans un règlement plus ou moins formalisé" et "l'invocation de ce règlement a pour objectif de faire entrer le malade dans un rôle prescrit, d'autant moins accepté que les règles édictées ne trouvent pas de justification claire et confinent parfois à l'absurde, voire à l'inhumanité".

Des témoignages de patients évoquent par exemple le réveil de leur enfant tôt le matin pour des habitudes de prise de température, "peu importe que les enfants dorment ou non, qu'ils aient enfin trouvé le sommeil après une nuit épuisante", témoigne la mère d'un enfant hospitalisé.

Les auteurs de l'étude rapportent aussi "des accueils ratés" de patient au moment de leur arrivée dans l'établissement de santé, qui "laissent des souvenirs souvent douloureux". Dans des témoignages, des patients non attendus ou mal accueillis racontent qu'ils ont vécu seuls leur entrée dans le service sans avoir d'information ni d'accompagnement.

Un autre reproche adressé aux professionnels concerne "leur manque de disponibilité" sur un plan quantitatif et qualitatif. "Les professionnels, 'happés' par l'organisation et les tâches à réaliser, 'oublient' les malades", écrivent les auteurs, ce qui peut aboutir à une rupture de prise en charge.

Les autres maltraitances ressenties concernent le "rythme imposé des soins", le bruit et le manque de repos, ce qui "finit parfois par entrer en contradiction avec la qualité des soins et les règles d'hygiène, accélérant la dégradation de l'état des personnes".

Les délais d'attente, mais aussi l'organisation de la sortie, sont évoqués par beaucoup comme "un dysfonctionnement fréquent".

Des droits non respectés

Les auteurs ont relevé un manque de respect des droits des patients, tel que des défauts d'information. Ils pointent du doigt "les conditions de délivrance de l'information" et soulignent que "si certains médecins délivrent l'information avec humanité, d'autres délivrent l'information avec brutalité, sans égards, sans laisser place aux interrogations des patients".

Enfin, de nombreux témoignages, écrits ou oraux, font mention de douleurs intenses qui n'ont "pas été prises en charge". Certaines relèvent d'une absence de prise en charge de la douleur due à la maladie ou aux suites d'une intervention et d'autres d'une "brutalité des actes de soins".

La dignité ne semble "pas toujours respectée". Ont été souvent citées "les atteintes à la pudeur liées notamment au manque de discrétion dans la gestion du 'petit linge', l'incontinence et le sentiment d'infériorisation et d'humiliation qui les accompagnent", tout comme des "atteintes à la confidentialité et à l'intimité".

Les urgences, les situations de fin de vie et les services de pédiatrie sont particulièrement concernés par les plaintes de patients.

Dans leur étude, les auteurs ont également retranscrit la position des soignants et donnent quelques pistes pour prévenir la maltraitance et favoriser la bientraitance (cf dépêche APM EHNAR002).

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