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dimanche 3 avril 2011

Le démantèlement de l'hôpital public

Nous savons tout l'attachement que portent les habitants à leur hôpital, service public le plus apprécié des Français et pierre angulaire de notre système de santé. Or, force est de constater qu'il se trouve aujourd'hui à la croisée des chemins, d'une part devant évoluer pour faire face à de profondes mutations sanitaires et sociales, d'autre part confronté à un démantèlement rarement vu auparavant. Situé en plein cœur de Paris, l'Hôtel-Dieu, qui accueille annuellement 120 000 urgences et 350 000 consultations (60 % des consultants venant d'Ile-de-France, hors Paris) illustre de façon particulièrement emblématique cette situation.

Pour s'adapter et promouvoir la médecine du XXIe siècle, l'hôpital public se doit d'opérer une mutation. La chronicisation de certaines maladies comme le cancer, l'apparition de nouveaux traitements, le vieillissement de la population, le développement important de certaines pathologies, diabète, obésité, sont autant de bouleversements qui appellent de nouvelles prises en charge et impliquent une vaste réorganisation de l'hôpital. Face à ces évolutions, la prise en charge des personnes dans leur cadre de vie et le développement des soins ambulatoires, gages de la réduction des hospitalisations conventionnelles, sont autant de défis à relever.

Pour être efficace, une politique de santé publique ambitieuse se doit de réfléchir à une meilleure articulation entre l'hôpital et les acteurs de santé du territoire, comme le champ médico-social, ou la médecine de ville. Elle se doit de développer également des actions de prévention, de dépistage, de suivi "personnalisé" des patients à risque. Enfin, à l'heure où l'accroissement des inégalités fragilise notre société, plus que jamais, l'indispensable égalité d'accès aux soins doit être au cœur d'une nouvelle politique de santé.

Bien que fondamentales, ces questions d'avenir sont éclipsées par une brutale politique de mise à mal de l'hôpital public.

On savait déjà l'hôpital public en danger. Dès 2008, dans le contexte du vote de la loi Bachelot, des mouvements réunissant professionnels et personnalités reconnues (comme Sauvons l'hôpital, ou le Mouvement de défense de l'hôpital public) avaient largement relayé et commenté les dangers qui menacent l'hôpital : logiques de rentabilité, gouvernance défaillante, installation d'une médecine à plusieurs vitesses, découragement des personnels, etc.

Aujourd'hui, on assiste à son démantèlement. A titre d'exemple, dans nos quartiers du centre de Paris, la directrice de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) a décidé le transfert des bureaux administratifs du siège de l'AP-HP vers l'Hôtel-Dieu, fermant ainsi presque tous les services de soin de l'hôpital, bien desservi par un important réseau de communication et donc très accessible. Remplacer des services médicaux par des bureaux ne repose que sur une seule logique, avouée par la direction, vendre les immeubles libérés par le siège, situés en face de l'Hôtel de Ville de Paris, et ainsi réaliser une juteuse opération de spéculation immobilière, susceptible de combler très partiellement le déficit de l'AP-HP .

Cette décision traduit une double crise :

Une crise d'identité. Voilà qu'une politique immobilière fait office de politique de santé. Ainsi, comment qualifier une politique de santé qui ferme des services de soin pour y installer des bureaux ? Comment qualifier une politique de court terme fondée sur la spéculation immobilière, avec pour unique logique celle de la rentabilité ?

Une crise de la gouvernance. Au travers de sa décision unilatérale qui condamne à terme l'Hôtel-Dieu sans aucune information préalable ni concertation, la direction de l'AP-HP, sous les ordres du ministère de la santé, illustre parfaitement cette politique systématique de mépris menée par l'actuel gouvernement. Après les enseignants et les juges, le personnel hospitalier est traité sans aucune considération. A ce titre, en évinçant les élus des commissions de surveillance des hôpitaux, la loi Bachelot avait préalablement scellé la coupure entre la vie citoyenne et la santé publique, interdisant tout regard des citoyens sur leur système de santé, laissant aux techniciens, voire aux technocrates le “soin” de conduire des réformes étrangères aux besoins des populations.

Cette crise n'est pas spécifiquement celle de l'Hôtel-Dieu, car tout un système se trouve menacé. Ce qui affecte aujourd'hui l'Hôtel-Dieu n'est que la déclinaison locale d'une voie ouverte à la privatisation du système de santé. Au sein de l'AP-HP, d'autres hôpitaux sont menacés de fermeture, Tenon dans le XXe arrondissement, Antoine Béclère à Clamart, et de nombreux services partout sur Paris. L'égalité d'accès aux soins prend un mauvais coup. La suite, nous la connaissons, il suffit d'observer certains "exemples" étrangers : faute de pouvoir se faire soigner dans une structure publique près de chez soi, les habitants vont devoir se tourner vers les cliniques et assureurs privés. Bref, se dessine une médecine de confort pour ceux qui ont les moyens, pour les autres la vétusté de l'hôpital public.

L'Hôtel-Dieu, fut récemment promoteur d'une réflexion sur les mutations sanitaires et sociales, porteur d'un projet pour le système de santé de demain, fondé sur les urgences, l'ambulatoire et un hôpital universitaire de santé publique. L'AP- HP, qui voulait en faire "l'hôpital de santé publique de demain", "le symbole de l'innovation et de l'ambition en matière de santé", dixit son ancien directeur général, n'a rien trouvé de mieux à faire que programmer sa fermeture, pour réaliser une opération de spéculation immobilière. Cela illustre parfaitement une société où l'argent est roi, et où l'humain n'est plus au cœur des politiques. Triste avenir pour les générations futures.

samedi 27 novembre 2010

Neuf cents accidents médicaux, en moyenne, surviennent chaque jour dans les hôpitaux

Neuf cents accidents médicaux, en moyenne, surviennent chaque jour dans les hôpitaux et cliniques français, révèle la deuxième enquête nationale sur les événements indésirables graves liés aux soins (Eneis), publiée par le ministère du travail et de la santé. Sur ce total, quatre cents seraient "évitables" estime le rapport. Ce résultat élevé est proche de celui de 2004.

Chaque année, ce sont donc entre 275 000 et 395 000 "événements indésirables graves" (EIG) qui surviendraient dans les établissements hospitaliers français, estime l'étude. "Globalement, ça n'est pas brillant", convient Philippe Michel, directeur du Comité de coordination de l'évaluation clinique et de la qualité en Aquitaine (CCECQA), coauteur de l'étude réalisée avec la Drees (évaluation et statistique). "Mais cela ne doit pas masquer les progrès qui ont été faits, par exemple en anesthésie-réanimation ou contre les infections nosocomiales, c'est-à-dire contractées à l'hôpital", tempère-t-il.

Les EIG évitables (de 160 000 à 290 000 par an) sont ceux "qui n'auraient pas eu lieu si les soins avaient été conformes à la prise en charge considérée comme satisfaisante au moment de leur survenue". "Vingt pour cent des EIG évitables survenus à l'hôpital ou en clinique sont associés à des médicaments (...). Ils sont en cause dans quasiment la moitié des cas d'EIG ayant entraîné une hospitalisation", ajoute Philippe Michel.

DES ACCIDENTS EN LIEN AVEC DES CONDITIONS DE TRAVAIL DÉGRADÉES

Il évoque le problème des traitements anticoagulants, où l'on n'enregistre guère de progrès, avec des traitements compliqués qui peuvent être difficiles à gérer par des patients âgés. Autre tendance, "une augmentation des hospitalisations pour infection du site opératoire, qui peut être liée à l'identification au domicile d'une infection contractée dans un établissement de santé. Mais cela peut être aussi la conséquence d'une mauvaise prise en charge des plaies opératoires en ambulatoire [hors de l'hôpital]", dit-il. Comme en 2004, l'étude pointe des "défaillances humaines des professionnels", moins souvent en lien avec des défauts de connaissances qu'avec des conditions de travail dégradées, "une supervision insuffisante des collaborateurs" ou encore une "mauvaise organisation" ou un "déficit de communication entre professionnels", note le Dr Michel.

Cependant, tous les événements indésirables liés aux soins ne sont pas considérés comme évitables. Ils peuvent aussi résulter de risques auxquels est exposé le patient dans le cadre de soins optimaux, souligne l'étude. Ils touchent plus fréquemment des patients fragiles, âgés, souvent déjà dans un mauvais état de santé.

Le plus souvent, l'événement indésirable entraîne un prolongement d'hospitalisation, mais le pronostic vital ou une incapacité à la sortie de l'hôpital peuvent être en jeu, voire, plus rarement, la mort.

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Neuf cents accidents médicaux, en moyenne, surviennent chaque jour dans les hôpitaux et cliniques français, dont quatre cents seraient évitables, selon une nouvelle étude du ministère de la santé. Ces "événements indésirables graves" (EIG) ont des causes multiples, sur lesquelles revient Nicolas Gombault, directeur de la mutuelle d'assurance du corps de santé français Sou médical et membre de l'association La Prévention médicale.

Le chiffre de 900 accidents médicaux par jour vous paraît-il élevé ?

Nicolas Gombault : Cette étude conforte les données dont nous disposons. Il faut noter que le nombre de sinistres déclarés est beaucoup plus faible : de 12 à 15 000 accidents chez les médecins praticiens et en hôpitaux et cliniques donnent lieu à des réclamations par an. Cette étude-ci est fondée sur les cas avérés d'EIG signalés par les professionnels de santé. Le nombre d'EIG reste en fait faible par rapport au volume des actes médicaux, estimé à environ 500 millions d'actes médicaux remboursés par les caisses d'assurance maladie par an. Mais il reste toujours trop important, notamment si l'on considère que 40 à 50 % d'EIG sont évitables. Pour le reste, il faut savoir que toute prescription médicamenteuse ou tout acte médical peut comporter des risques. Et, si l'on est alcoolique, diabétique ou hypertendu, on a plus de risques de contracter des maladies nosocomiales.

A qui la faute ?

Les EIG sont très variés et peuvent aller de la chute d'un patient dans un couloir à une faute évidente du personnel médical comme laisser sortir le patient opéré sans anticoagulants, ou se tromper de patient ou de côté à opérer. Les causes sont multiples et plurisectorielles : défaut ou erreur de médicamentation, erreurs et défaillances humaines, infections nosocomiales ou mauvaise coordination entre professionnels de santé et entre établissements de santé.

Ces derniers problèmes dits "systémiques" sont les plus fréquents. Chaque professionnel de santé est très bon dans son domaine mais il y a un problème dans la prise en charge globale du patient. C'est toute l'organisation du système de soins qui peut être remise en cause. La multiplicité des tâches du personnel de santé et le manque de personnel jouent notamment sur cette organisation, mais il est difficile de dire qu'il y a une dégradation sur ce point ces dernières années. Ce sont davantage les pratiques qui sont en cause et le manque de prise en considération des risques.

Prenons le cas d'une opération de prothèse globale de la hanche gauche où le patient se retrouve finalement opéré de la hanche droite. La première réaction est de dire que la faute incombe au chirurgien et in fine, s'il y a plainte, le juge établira la responsabilité du chirurgien. Mais, quand on creuse, on remarque souvent que l'accident est lié à un système d'organisation des soins qui n'est pas efficient, où aucune procédure n'a été mise en place pour empêcher l'accident, comme par exemple la check-list utilisée aux Etats-Unis. Cette dernière, qui consiste à vérifier tous les paramètres avant l'opération, n'est obligatoire que depuis peu. En obligeant le chirurgien à apposer ses initiales sur la hanche à opérer, on limite les risques d'erreur.

Quelles mesures doivent être prises pour réduire le nombre des EIG ?

Outre l'introduction de procédures de vérification comme la check-list, le passage, il y a quelques jours, du décret d'application obligeant chaque établissement de santé à déclarer tout EIG va dans le bon sens : cette déclaration permettra de mieux connaître les causes des EIG pour éviter les erreurs. Elle va changer en profondeur les pratiques et instaurer une culture de la sécurité et de la qualité qui n'est actuellement pas une priorité. En matière de prévention des risques, il est nécessaire de passer d'une culture défensive à une "culture de l'erreur". Il faut repenser l'organisation des établissements de santé en ce sens.

Sur quoi portent les réclamations en matière d'accidents médicaux ?

Elles varient d'une spécialité à l'autre. Il y a plus de généralistes que de spécialistes mais l'on estime que seul un généraliste sur cent est visé chaque année par une réclamation, contre un chirurgien sur deux. Pour les généralistes, ce sont en majorité des erreurs de diagnostic. La plupart du temps, le médecin est passé à côté de la maladie. Pourquoi ? L'exemple typique est la méningite, où le patient a été vu dans le cadre d'une routine d'épidémie de grippe, entre 36 patients atteints de grippe. Le médecin n'a pas cherché un autre diagnostic. Il faut mettre en place une méthodologie.

La communication avec le praticien est un facteur déterminant. Certains médecins, quand l'événement est survenu, ne savent pas communiquer et ne savent pas reconnaître qu'il y a eu un incident. C'est une cause significative des réclamations. On reproche également beaucoup au médecin des manquements au devoir d'information.

Le nombre de réclamations est-il en augmentation ?

Globalement, les réclamations sont en nette augmentation. La jurisprudence évolue vers davantage de mise en cause de la responsabilité des médecins et une plus grande sévérité des magistrats : 68 % des dossiers jugés sur le fond se terminent par une condamnation et le coût moyen des indemnités augmente. C'est une très grande source d'inquiétude pour ceux qui sont les plus exposés au risque : les chirurgiens et obstétriciens. Ces derniers peuvent être condamnés à titre personnel à des indemnités importantes, ce à quoi il faut trouver une solution. Car, à échéance, on va vers la suppression des obstétriciens en clinique

samedi 6 novembre 2010

Histoire d’une trans-formation : entreprendre des études d’infirmier quand on est aide soignant

En France, la formation tout au long de la vie est possible par le biais de la formation continue et la formation professionnelle. Elles permettent de se maintenir dans la vie active en réactivant, en enrichissant ses connaissances, ses compétences et en permettant d’évoluer au cours de sa carrière. En ce qui concerne la formation professionnelle hospitalière, une étude de la DREES , réalisée en 2000, montre que le nombre d’étudiants infirmiers qui étaient auparavant professionnels de santé a tendance à augmenter. Ce chiffre s’élève à 8.5 % en France. C’est le cas des aides soignants qui peuvent se présenter aux épreuves de sélection du concours d’admission à l’Institut de Formation en Soins Infirmiers pour leur permettre d’évoluer professionnellement.

Devenir infirmier par promotion professionnelle

Au cours de mon exercice professionnel à l’IFSI, j’ai accompagné des étudiants qui étaient aides soignants auparavant. C’est au cours de ces accompagnements que je me suis aperçue que certains avaient quelques difficultés à suivre la formation malgré leur statut d’aides-soignants voire étaient en situation d’échec. En effet, j’ai relevé dans les dossiers que certains avaient des difficultés de compréhension mais aussi d’analyse notamment en ce qui concerne le raisonnement clinique, les démarches de soins à entreprendre. Lors des accompagnements, certains arrivaient à prendre de la distance et à améliorer leurs résultats en se questionnant mais pour d’autres, cela étaient plus difficile voire impossible. J’avais le sentiment que malgré l’accompagnement mis en œuvre, ils ne prenaient pas conscience de leurs difficultés et restaient sur leurs positions. Ceci leur posa problème dans leur formation car ils n’évoluaient pas dans leur apprentissage. J’ai enfin observé que les étudiants étaient motivés dans leur étude mais ils bloquaient et ne pouvaient plus produire. En effet, certains travaillaient durement, de manière régulière pour réussir à mémoriser les cours, pour les comprendre. Mais malgré les efforts fournis par les étudiants, le résultat restait médiocre voire insuffisant.

Une rupture professionnelle

La formation d’infirmière réalisée par le biais de la formation professionnelle est perçue comme une progression dans la carrière professionnelle de l’aide-soignant car il s’agit d’une ascension dans sa vie professionnelle, d’une opportunité à saisir. Mais ce dernier a-t-il mesuré l’impact de la formation, les remises en cause, les réflexions que cela demande ? En fonction de leurs représentations sur la profession infirmière, les aides-soignants décident ou non d’effectuer cette formation. En effet, quand ils travaillent dans les services de soins, les aides-soignants observent le travail de l’infirmière. Ils se forgent une opinion sur ce travail, sur la façon d’être de l’infirmière, sur son rôle. Cependant, la complexité de la formation leur échappe et ils prennent conscience des difficultés seulement quand ils investissent la formation. Tout ce qui est du domaine de la responsabilité, les échanges avec les médecins, la réflexion sur la prise en charge du patient…, ils n’en n’ont pas conscience de suite. Ceci peut créer des remises en question, des doutes quand ils commencent à réaliser l’impact de la formation et de l’investissement que cela demande.

Le point de vue des acteurs

Les étudiants évoquent que la remise en cause n’est pas un problème en soi, ils changent leurs habitudes et pour eux, c’est un aspect positif de la formation. Il faut « Avoir un œil critique pour évoluer ». Cependant, un élève dit : « Par réflexe, je pense que je reproduis ce que j’ai appris, il y a quelques années par habitude ». Cet étudiant met bien en avant le fait que les habitudes sont difficiles à changer mais que c’est aussi une sécurité. Plusieurs étudiants expliquent que ce n’est pas chose facile que de trouver sa place. Une étudiante témoigne de son expérience lors de son premier stage où elle s’était présentée comme étudiante infirmière mais ancienne aide-soignante. « Les soignants me voyaient comme une collègue et non pas comme une étudiante ». Cette confrontation entre le statut d’étudiant et celui de professionnel est perçue de manière difficile pour les étudiants. Un autre dit : « Au début, je me sentais perdu car je ne savais pas ce que j’avais ou non le droit de faire en tant qu’étudiant. Et surtout, je n’était plus dans le service comme aide-soignant ». Ceci exprime bien que les étudiants en promotion professionnelle ont quelques difficultés à trouver leur place. La plupart évoquent la difficulté de se remettre à apprendre au début de leur formation. Mais cette difficulté s’estompe un peu une fois le rythme repris. Ils exposent le fait qu’ils utilisent ce qu’ils ont appris en travaillant pour progresser dans la formation. « Mais je m’aperçois que mon expérience me permet quand même d’apprendre parce que je l’utilise pour mes cours ». L’étudiant exprime que son expérience lui sert pour apprendre et notamment dans certaines circonstances à comprendre les situations. Sur les quatre étudiants, un seul expose le fait qu’il n’est pas toujours facile de comprendre les cours. Trois formateurs ont été interrogés et mettent en avant le fait que ce ne sont pas les étudiants, aides soignants auparavant qui ont le plus de facilités au cours de leurs études. Un formateur dit que l’expérience n’est pas toujours un plus pour la formation, un autre évoque que ces étudiants ont quand même parfois des difficultés. Ces différents entretiens révèlent que ces étudiants ont des difficultés de remise en cause par rapport à leur travail. Les formateurs expliquent qu’ils savent ou plutôt pensent avoir raison. « Ils ont de la pratique et pour eux, c’est acquis » exprime un formateur, c’est-à-dire que l’étudiant ne va pas remettre en question ses acquis. Ils ont des difficultés dans la prise de distance avec leur travail. De plus, lors de ces entretiens, les formateurs expriment que ces étudiants ne se posent pas forcément de questions. Ils font les choses par habitude, selon des procédures sans comprendre forcément pourquoi ils le font. Un des formateurs le verbalise en exposant ce que disent certains étudiants : « Nous on fait comme cela, j’ai appris à mettre l’alèze comme cela ». Ceci confirme que l’étudiant reste centré sur sa méthode et ne s’interroge pas. Un formateur met en avant le fait que les étudiants devraient utiliser leurs acquis pour avancer en tant qu’étudiant infirmier. Je cite : « Les connaissances qu’ils ont acquises, ils ne savent pas les mobiliser pour devenir des professionnels infirmiers ». Ceci signifie que les étudiants ne tirent pas profit de ce qu’ils connaissent déjà. Un élément important ressort également : ils changent d’identité et ce passage de la posture aide-soignant à la posture d’étudiant infirmier leur est difficile. Un formateur explique qu’il faut « Déconstruire leur identité d’aide-soignant ». Ce changement crée de l’insécurité chez l’étudiant, « Ils ont peur d’aller vers l’inconnu ». En effet, l’étudiant pensait savoir et il se rend compte qu’il ne détient pas la vérité. Ce formateur évoque le terme de « Résistance au changement ». « Ils s’accrochent à la formation aide-soignante ». Ce cadre de santé utilise des termes forts pour montrer que les étudiants sont en insécurité et qu’ils ont quelques difficultés à changer. De plus, certains reprennent leur place d’aide-soignant en stage. Cette notion d’identité apparaît dans les trois entretiens, les formateurs expliquent que ces étudiants n’ont pas un positionnement facile. Un formateur évoque que ces étudiants ont perdus leurs repères. « Ils ne sont plus aide-soignant mais ils ne sont pas encore infirmier ». Ils mettent en avant également le fait qu’ils ont du mal à trouver leur place par rapport à leurs pairs. Notamment, dans l’enceinte de l’IFSI, les autres étudiants les voient comme des professionnels. Ces trois formateurs expriment que les étudiants ont des difficultés en ce qui concerne la compréhension, la mobilisation de leur connaissance mais aussi des difficultés de réflexion. Deux formateurs expriment la notion « D’intelligence limitée » en parlant de ces étudiants pour évoquer ces problèmes de compréhension, d’analyse des situations de travail. De plus, un formateur explique que ces étudiants apprennent par cœur sans pour autant comprendre le sens de ce qu’ils apprennent. Ainsi, la perception du point de vue étudiant diffère de celui du formateur. Certains étudiants ont des difficultés de compréhension et d’analyse mais ne le verbalisent pas. Pour eux, les problèmes se situent plus dans leur statut d’étudiant.

Apprendre pour des adultes en formation, un rapport singulier au savoir

Apprendre vient du latin « apprehendere » qui signifie saisir, concevoir et comprendre. Ce terme a une double signification : appréhender dans le sens acquérir un savoir et appréhender qui fait référence au caractère affectif et émotionnel de ce terme. Pour apprendre, il ne suffit pas d’acquérir un savoir mais aussi de s’intéresser à la manière de l’acquérir.

Le rapport au savoir selon Françoise Hatchuel peut se définir comme « Un processus par lequel un sujet, à partir de savoirs acquis, produit de nouveaux savoirs singuliers lui permettant de penser, de transformer et de sentir le monde naturel et social [1] » . C’est, selon cet auteur un processus dynamique dans le sens où à partir de ses savoirs antérieurs, l’apprenant va construire de nouveaux savoirs. Le sujet évolue tout au long de la vie à partir de ce qu’il sait ou non et de la façon dont il se situe par rapport au savoir. En sociologie, le rapport au savoir de l’étudiant tire son origine de ce qu’il a vécu antérieurement. Il est fonction de la famille dans laquelle l’étudiant vit. En effet, nous n’avons pas la même perception de l’école en fonction de nos origines familiales. L’impact de la mauvaise note, le regard porté par les parents sur les résultats de l’enfant est différent en fonction des familles. La notion d’appartenance au groupe et la culture du groupe tiennent une place importante dans la construction du rapport au savoir. Il peut se produire un choc des cultures c’est-à-dire que l’étudiant a la sensation de trahir son groupe d’appartenance. Il ne se reconnaît plus dans ce nouveau groupe. La classe sociale de ses parents, de ses proches, peut influer sur son rapport au savoir. En effet, ceci provoque une non reconnaissance de la part de ses pairs au sein de l’institution. Par exemple, l’aide soignant qui se forme pour devenir infirmier peut ne plus être reconnu par ses collègues aides soignants. Pour réussir à l’école, il faut s’inscrire dans une nouvelle identité et de ce fait dans une nouvelle catégorie sociale.

En ce qui concerne le parcours scolaire, des « séquelles » peuvent subsister suite à des expériences scolaires vécues négativement par l’apprenant. Ce peut-être dû à un évènement qui s’est produit quand le sujet était enfant. Différentes causes peuvent en être à l’origine. Par exemple, ce peut-être lors de mauvaises relations professeurs-élèves ou lors de vécu difficile au cours de certaines évaluations. Suite à ces évènements, le rapport au savoir est alors fondé sur des représentations négatives de l’apprenant. Ceci peut avoir des conséquences sur son apprentissage futur. En effet, dans ce contexte, le savoir peut être facteur de stress, d’angoisse pour l’apprenant. Le rapport au savoir est unique c’est-à-dire qu’il est propre à chaque individu. Chaque personne construit son propre rapport au savoir dans le sens ou chacun a un vécu personnel de son parcours scolaire et de son expérience professionnelle. Il n’existe pas deux parcours de vie identique. Au cours de la formation infirmière, le savoir est sans cesse remis en question, l’apprentissage dépend de la personne elle-même, de ses questionnements et du contexte. Le constructivisme contribue à la compréhension de la construction du savoir par l’étudiant. Ce dernier ne se transmet pas, il se construit à partir des représentations et des connaissances des étudiants. Le but étant que les nouvelles informations prennent sens pour eux. C’est par la mise en action que l’apprenant va construire son savoir, structurer sa pensée et apprendre. A partir de ce qu’il sait déjà, il va appréhender des connaissances nouvelles et donc apprendre. Le constructivisme de Piaget correspond à un apprentissage qui se construit dans l’interaction entre le sujet apprenant et l’objet d’apprentissage. « Apprendre, ce n’est pas substituer des connaissances nouvelles à des connaissances préalables mais bien transformer des connaissances préalables en connaissances nouvelles [2] » . Pour inciter une personne à apprendre, il existe une notion de désapprentissage. Il faut transformer les représentations de l’apprenant pour entraîner une prise de conscience.

La relation pédagogique selon Carl Rogers

Selon Rogers (psychologue américain), l’apprentissage se définit comme une appropriation de sens pour le sujet. Le formateur est une ressource humaine mais il ne sait pas tout. Il encourage l’élève à chercher l’information. Ceci signifie que l’apprentissage nécessite une implication de l’étudiant pour apprendre. Selon lui, il est nécessaire de faire émerger les aptitudes de l’étudiant et le comportement de découverte pour susciter le désir d’apprendre. Cela permet à l’étudiant de s’appuyer sur ses propres connaissances en exploitant son propre savoir. A partir de là, il pourra alors progresser. Platon appelle cette théorie : la théorie de la réminiscence. Pour apprendre, il faut se ressouvenir c’est-à-dire faire appel à ses connaissances antérieures. Pour Platon, savoir c’est savoir que l’on ne sait rien. La prise de conscience de son ignorance est nécessaire pour chercher les solutions. Celle-ci ne peut se faire que si les conditions sont créées par le formateur. Rogers ajoute : « La connaissance est un objet qui ne se transmet pas mais naît de et de part l’expérience personnelle [3] » . Il fait référence à l’autostructuration de la connaissance c’est-à-dire que l’apprenant doit être impliqué dans son apprentissage pour pouvoir apprendre. « Les connaissances antérieures conditionnent fortement l’apprentissage de données nouvelles [4] » . Il met l’accent sur la nécessité d’utiliser les connaissances antérieures pour apprendre de nouveaux savoirs. Pour ce faire, il est important d’instaurer une relation pédagogique au cours de laquelle, le formateur est un médiateur. Cependant, il doit avoir conscience que tous les étudiants ne progressent pas à la même vitesse et surtout pas comme lui le souhaiterait. En effet, tous les étudiants ne se ressemblent pas, c’est pourquoi il est nécessaire d’adapter, d’individualiser l’accompagnement en fonction de chaque étudiant. De plus, le formateur doit être à l’écoute de l’étudiant notamment lors des suivis pédagogiques individuel. Il doit faire preuve de congruence, considération positive, individuelle et d’empathie. Il doit être authentique dans la relation qu’il instaure avec l’étudiant.

La spécificité de l’apprentissage de l’adulte en formation

Selon Madame Gourdon Monfrais, apprendre pour l’adulte en formation est fonction de chaque individu, de son vécu, de son itinéraire. L’apprentissage est marqué des réussites et des échecs de chacun. Il est en rapport avec les différentes expériences positives et négatives vécues mais aussi en rapport direct avec notre vécu à l’école. La formation de l’adulte commence avec son projet. Elle va bouleverser le statut intérieur de l’étudiant, elle va le transformer. C’est pourquoi l’étudiant doit être motivé pour réussir son apprentissage et son projet professionnel. Entreprendre une formation c’est être en quête d’une nouvelle identité. La formation est le moment qui sert à négocier, à tester cette nouvelle identité. L’adulte en formation passe d’une identité au travail à une construction d’identité professionnelle. Pour les étudiants en promotion professionnelle, ils passent d’un statut aide-soignant à un statut d’étudiant infirmier. Il faut alors construire cette nouvelle identité. Cela nécessite un effet de résonance pendant la formation qui va permettre ce travail de construction.

Sandra Bellier définit l’objectif de la formation professionnelle. Pour elle, « Il s’agit de faire en sorte que quelqu’un qui ne savait pas, sache et utilise ce qu’il a appris [5]. » . Elle nous explique que l’adulte en formation a besoin de savoir pourquoi il apprend, il doit comprendre le sens de ce qu’il apprend. La formation adulte passe par la compréhension de l’action. Cette notion de compréhension de l’action n’a de sens que parce qu’elle s’appuie sur des mises en action au cours de la formation : des situations d’engagement de l’apprenant. La motivation est un facteur d’apprentissage important pour l’adulte. Elle peut être intrinsèque c’est-à-dire liée au plaisir d’apprendre, car l’adulte apprend en premier pour lui-même. Selon Sandra Bellier. « On ne force pas un adulte à apprendre s’il ne comprend pas à quoi cela peut lui servir, s’il ne saisit pas le sens de l’effort de ce qui lui est demandé [6]. » . Il s’agit bien d’une démarche personnelle. La motivation est nécessaire pour apprendre mais cela ne suffit pas pour conduire un changement au cours de la formation. Sandra Bellier explique que l’adulte en formation aborde sa formation à partir de ses représentations. Il est nécessaire de comprendre le rôle des connaissances antérieures. En ce qui concerne la formation adulte, apprendre est différent d’une transmission de savoir car il a déjà un vécu qui lui permet d’aborder la formation de manière différente, d’avoir une perception différente. L’apprenant doit effectuer un travail d’appropriation des savoirs avec l’aide du formateur. Cependant, il peut exister des difficultés pour réapprendre car réapprendre suscite une nouvelle mise en relation, l’utilisation de son cadre de référence. Ceci suscite également de déconstruire son savoir initial notamment en le réinterrogeant. Il est nécessaire d’avoir conscience que l’on ne sait pas. De plus, chaque apprenant est unique et possède un vécu unique. « L’apprentissage ne part jamais de rien : chacun apprend en fonction de ce qu’il sait déjà, et réagit aux nouvelles acquisitions selon ses caractéristiques propres et son vécu [7]. » . Sandra Bellier explique que les étudiants ont une maturité affective et sociale dont il faut tenir compte dans l’apprentissage. C’est pourquoi il est important que le formateur s’interroge sur la manière dont il se souvient de ce qu’il a appris auparavant. Il part du principe que chacun possède des connaissances, des acquis, une intelligence propre et qu’il faut aller chercher ces données anciennes pour apprendre. Britt Mari Barth dans son ouvrage intitulé « le savoir en construction » explique que les apprenants manquent de confiance en eux notamment en ce qui concerne leurs capacités intellectuelles ce qui aboutit à l’échec, l’abandon, le découragement de ces étudiants. Pour éviter que les étudiants en arrivent là, il faut « Rendre le savoir accessible, exprimer le savoir dans une forme concrète, engager l’apprenant dans un processus d’élaboration du sens, guider le processus de construction de sens et préparer au transfert des connaissances et à la capacité d’abstraction [8] » . Toutes ces réflexions nous amènent à questionner le rôle du formateur pour accompagner cette population d’étudiants au cours de leur formation.

La place du formateur dans l’accompagnement des étudiants professionnels

Au regard de cette analyse, la place du formateur prend sens. Son rôle va être d’accompagner ces étudiants afin qu’ils investissent la formation différemment. Carl Rogers explique que la relation pédagogique est une relation de confiance qui va permettre à l’étudiant d’exprimer ses émotions, ses représentations, ses résistances afin de pouvoir progresser au cours de la formation. Le formateur en formation adulte doit tenir compte des représentations des apprenants comme source de désapprentissage, de l’importance des enjeux individuels et sociaux et du capital symbolique de l’apprenant. En effet, les étudiants arrivent en formation avec leurs représentations de la profession infirmière. Pour ce faire, il semble nécessaire que les étudiants écrivent leur récit de vie afin de savoir argumenter pourquoi ils sont en formation pour que celle-ci prenne sens pour eux. Car l’adulte a besoin de comprendre le sens de ses actions. De plus, cette phase diagnostique va permettre d’avoir un suivi particulier de l’étudiant afin de mieux le connaître. Ce document va permettre aux étudiants de se questionner et de construire leur projet professionnel. De plus, je pense qu’il est nécessaire que l’étudiant le présente à son formateur référent pédagogique. Il faut faire vivre ce document et le réajuster en début de semestres 3 et 5 afin de valoriser les acquisitions des étudiants et leur permettre de prendre confiance en eux. Le médiateur c’est-à-dire le formateur doit comprendre ce que l’apprenant sait déjà en le laissant s’exprimer afin de l’accompagner dans son cheminement. De plus il doit s’appuyer sur les connaissances antérieures de l’apprenant. Dans la formation adulte, on admet que les étudiants ont de mauvaises habitudes de travail intellectuel qui peuvent être un obstacle à l’acquisition de nouvelles informations mais c’est avec aide que les étudiants pourront progresser. Il est important que le formateur se questionne également sur la formation de ces étudiants et sur les propositions à effectuer. Depuis le référentiel du 31 juillet 2009, concernant la formation d’infirmière et en fonction de leur critère de sélection, les étudiants infirmiers en possession du Diplôme d’Etat d’aide-soignant peuvent valider d’office la compétence 3 (accompagner une personne dans la réalisation de ses soins quotidiens). Cette validation va permettre de valoriser ces étudiants en mettant en avant leurs acquis, leurs compétences.

Cette analyse m’a permis d’identifier différentes raisons qui peuvent avoir une influence sur l’apprentissage des étudiants infirmiers en promotion professionnelle. En effet, ce sont des étudiants qui manquent de confiance en eux notamment en ce qui concerne leur capacité intellectuelle. Mais ce peut être également leur rapport au savoir qui peut quelquefois être négatif et de ce fait perturbe les apprentissages futurs. Le désir d’apprendre, la motivation des apprenants sont des facteurs à prendre en compte. Un autre axe qui est important pour l’adulte en formation, c’est la mise en projet et la réflexion du sujet à partir de ses anciennes connaissances. Les compétences, les connaissances acquises auparavant sont importantes pour son apprentissage à venir et également pour la construction de leur identité professionnelle. Selon Jacqueline Beckers « La construction de l’identité évolue tout au long de la vie de l’individu. Elle passe d’une identité individuelle à une identité sociale et une identité professionnelle [9] » .

BIBLIOGRAPHIE

- Arrêté du 31 juillet 2009 relatif au Diplôme d’Etat d’Infirmier Référentiel
- BARTH (B-M). Le savoir en construction. Former à une pédagogie de compréhension. Paris, Editions Retz, 1993, 208 p.
- BECKERS (J). Compétences et identité professionnelle. Paris, Editions De Boeck, 2007, 347 p.
- BELLIER (S). Ingénierie en formation d’adultes. Paris, Editions Liaisons, 1999, 122 p.
- BOURGEOIS (E) et NIZET (J). Apprentissage et formation des adultes. Paris, PUF, 1999, 232 p.
- BOURGEOIS (E). Apprendre et faire apprendre. Paris, Presse Universitaire de France, 2006, 300 p.
- HATCHUEL (F). Savoir, apprendre, transmettre. Paris, La Découverte, 2007, 270 p.
- ROGERS (C). Liberté pour apprendre. Paris : Edition Dunod, 1976, 364 p.

[1] HATCHUEL (F). Savoir, apprendre, transmettre. Paris, La Découverte, 2007, 270 p.

[2] BOURGEOIS (E) et NIZET (J). Apprentissage et formation des adultes. Paris, PUF, 1999, p 34.

[3] ROGERS (C). Liberté pour apprendre, Paris : Edition Dunod, Paris, 1976, p 156

[4] BOURGEOIS (E). Apprendre et faire apprendre. Paris, Presse Universitaire de France, 2006, p 59.

[5] BELLIER (S). Ingénierie en formation d’adultes. Paris, Editions Liaisons, 1999, p : 13

[6] BELLIER (S). Opus cite p : 23

[7] CHIOUSSE (S). Pédagogie et apprentissage des adultes. Etat des lieux et recommandations. 2001, p : 43

[8] BARTH (B-M). Le savoir en construction. Former à une pédagogie de compréhension. Paris, Editions Retz, 1993, p : 13.

[9] BECKERS (J). Compétences et identité professionnelle. Paris, Editions De Boeck, 2007, p : 145


Marilyne Chesne



jeudi 22 juillet 2010

La solitude : un chemin vers soi-même

Le rapport sur la solitude publié début juillet par la fondation de France révèle une grande souffrance sociale. Elle est un symptôme fort de notre manière problématique de vivre avec les autres, et de vivre avec nous-mêmes. La relation avec les autres nous constitue comme être humain ; elle est comme le socle sur lequel chacun peut construire sa vie. Tout au long de notre existence, elle nous façonne ; c'est dans la relation que se joue une grande partie de notre vie.

Nous entrons dans le monde en apprenant à être avec les autres. Le développement psychologique et social de chacun est ainsi marqué par ce qui se joue dans ses liens avec autrui.

Ces liens sont des vecteurs à travers lesquels chacun intériorise au cours de son apprentissage social des rôles, des normes, des valeurs sur la manière de vivre avec les autres et de se comporter avec eux de façon acceptable socialement.

Aujourd'hui, les relations sont marquées chez de nombreuses personnes par une dislocation de ces rôles, de ces valeurs, liée en particulier à la baisse de conscience des responsabilités, de la prolifération des ersatz relationnels que sont les réseaux sociaux sur Internet, de l'individualisme désespéré qui se manifeste comme une affirmation illusoire d'autonomie. Dans le fond, nous n'apprenons plus à vivre réellement avec les autres.

Les fractures de la vie (chômage, séparation, mort d'un proche, maladie grave, accident, catastrophe) sont des révélateurs de la fragilité de nos liens et représentent souvent des atteintes destructrices : elles nous excluent du monde social, nous rejettent, nous isolent.

La solitude montre de ce point de vue qu'il ne s'agit pas seulement d'un problème social d'isolement et de rejet, mais aussi d'une faillite de notre mode d'existence sociale. Quel est au fond la vraie nature de nos attachements qui nous construisent, mais qui peuvent aussi nous détruire ?

La solitude apparaît alors aux yeux de beaucoup comme une expérience négative, triste, affreuse où l'on n'a parfois plus de raisons de vivre. A cet égard se pose une question fondamentale : est-ce que nous savons encore vivre avec nous-mêmes ? Si la solitude est perçue négativement aujourd'hui, n'est-ce pas parce que nous n'avons pas pris, ni fait l'expérience avec nous-mêmes ? Nous ne réalisons ni nous n'acceptons réellement ce que cela comporte de positif pour vivre.

Nous pensons la solitude comme une expérience négative à éviter car nous percevons souvent la solitude comme une perte de nous-mêmes ; elle nous prive de la reconnaissance dont nous avons besoin du fait que nous n'existons souvent que dans le regard des autres. Or, dans la solitude chacun est renvoyé à lui-même Tout le monde fait un jour l'expérience de la solitude à travers les épreuves de la vie où on est confronté à soi-même, à sa propre vie celle que chacun doit assumer seul.

Dans la vie ordinaire nous pensons souvent de façon illusoire que les autres nous aident à régler nos problèmes ; en fait, quand on est seul alors seulement on réalise que personne ne règle le problème à notre place. La solitude est plus qu'on ne le croit une école de vie où l'on peut beaucoup apprendre sur soi-même, apprendre à vivre avec soi-même, par soi-même et non plus par procuration avec les autres.

LE RETOUR VERS SOI DANS LA SOLITUDE, UN PASSAGE VERS SA PROPRE VIE

La solitude peut-être une école où l'on devient responsable de soi, mais plus largement aussi responsable des autres car la solitude peut être une expérience d'ouverture au monde et non d'enfermement. La solitude est si difficile à supporter par ce que nous avons souvent tout misé sur les relations extérieures, alors que nous n'avons peut-être jamais réussi à construire notre propre vie en ayant une vie à nous, une vie intérieure.

Pour beaucoup, l'intérieur c'est le vide, car nous ne savons pas quoi faire avec nous-mêmes. Nous nous ennuyons quand nous sommes seuls, peut-être parce que nous sommes étrangers à nous-mêmes. C'est dire que la solitude est une expérience indispensable de rencontre avec soi-même. La solitude, c'est prendre sa vie en main, vivre avec ce que nous sommes devenus, pour nous retrouver. Car bien souvent nous faisons tout pour échapper à nous-mêmes.

Apprendre à vivre sa solitude, c'est aussi commencer à habiter sa propre vie. La solitude apprend combien il est difficile d'avoir une vie à soi. Car se retrouver, c'est être présent à soi, c'est retrouver un espace intérieur où on se réapproprie sa vie. La dimension de l'intériorité est souvent dissociée de la solitude et mal comprise. Il n'y a pas d'intérieur sans séparation, qui n'est pas simplement coupure d'avec les autres ; exister comme être seul, c'est une condition essentielle pour se retrouver avec soi.

Se retrouver avec soi est donc une exigence de la solitude pour se construire et se construire comme être humain. Ce retour vers soi est le mouvement même vers sa propre réalisation qui apparaît d'autant plus nécessaire que nous sommes tous pris dans des situations relationnelles qui nous enferment souvent et nous dispersent.

Le retour vers soi dans la solitude est un voyage que les circonstances de la vie nous imposent souvent, mais qu'il faut savoir accueillir non comme un drame et une impossibilité de vivre, mais comme un passage vers sa propre vie.

Alors seulement la solitude peut donner lieu à une métamorphose intérieure qui permet de vivre votre vie comme le seul chemin de notre accomplissement véritable.

Gustave Nicolas Fischer est l'auteur de La Trace de l'Autre (Odile Jacob, 2005).

jeudi 1 juillet 2010

Présidence de l'AP-HP : Briet l'emporte sur Le Guen dans une élection très surveillée

'est une élection hautement symbolique qui s'est tenue, mercredi 30 juin à l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), et il aura fallu trois tours pour trancher : le haut fonctionnaire Raoul Briet (ancien directeur de la Sécurité sociale, magistrat à la Cour des comptes et membre de la Haute autorité de santé), a été élu, par 8 voix contre sept, président du tout nouveau conseil de surveillance du plus gros hôpital de France. Face à lui se trouvait Jean-Marie Le Guen, adjoint (PS) au maire de Paris, jusque-là président suppléant du conseil d'administration de l'institution, et candidat à sa propre succession, même avec un changement de structure.


C'est en effet la loi Bachelot, votée en 2009, qui a créé les conseils de surveillance, en remplacement des conseils d'administration. Avec une évolution majeure : peut désormais être élu président, non plus seulement le maire de la ville où est situé l'établissement, mais aussi une "personnalité qualifiée". Une révolution, et un enjeu politique, surtout à Paris.

Aussitôt, le maire Bertrand Delanoë a fait savoir ses "vifs regrets" que le choix ne se soit pas porté sur un élu. "C'est encore une fois la manifestation d'un traitement spécifique à l'AP-HP, un consensus ayant été trouvé pour que les CHU des autres grandes villes demeurent présidés par des élus, écrit-il, regrettant cette rupture supplémentaire du pacte de confiance entre l'Etat et les collectivités locales."

"PARODIE DE DÉMOCRATIE"

Le syndicat Sud des hôpitaux parisiens, pour sa part, a réagi jeudi 1er juillet : "Élection du président du conseil de surveillance de l'AP-HP: l'Elysée reprend la main", titre-t-il son communiqué. Il y déplore des nominations au conseil téléguidées, et dénonce une "parodie de démocratie".

Ironie du sort, M. Briet a été désigné au conseil de surveillance dans la catégorie "personnalités qualifiées" par Claude Evin, lui-même nommé directeur général de l'Agence régionale de santé d'Ile-de-France par le gouvernement… et ancien ministre socialiste de la santé. Tandis que M. Le Guen avait annoncé sa candidature depuis longtemps, il n'avait confirmé la sienne que la veille du scrutin.

Le système ayant changé, il estime qu'un profil comme le sien pourrait permettre de contribuer à moderniser l'AP-HP. Il a eu notamment la charge du récent rapport remis à Nicolas Sarkozy sur le respect de l'objectif des dépenses de santé. Maintenant l'élection passée, le conseil de surveillance va devoir examiner le budget 2010 des hôpitaux de Paris, puis leur plan de modernisation 2010-2014. Deux sujets qui suscitent de vifs remous chez les médecins et les soignants, car de nombreuses suppressions de postes pourraient être décidées.

samedi 22 mai 2010

Analyse juridique détaillée de la loi "Hôpital"


Les enjeux de la réforme de l'hôpital sont majeurs :
- mieux coordonner les actions des établissements de santé pour répondre aux besoins de la population,
- répartir de façon plus égalitaire l'offre de soins sur le territoire,
- développer une politique de prévention et de santé publique
- et définir les missions et moyens des agences régionales de santé (ARS). Les ARS constituent l'innovation principale de ce texte. Ces nouvelles instances déclineront à l'échelon régional les objectifs de la politique nationale de santé, les principes de l'action sociale et médico-sociale et ceux de la protection sociale, à savoir le caractère universel, obligatoire et solidaire de l'assurance maladie.

Le Conseil constitutionnel a rejeté le recours contre cette loi, ne censurant qu'un petit nombre d'articles présentés comme secondaires. Il n'en reste pas moins que les opposants à la réforme restent mobilisés. Décryptage de Christophe Lonqueue - SCP Sartorio, Lonqueue, Sagalovitsch & Associé, avocats au barreau de Paris ("La nouvelle gouvernance des établissements publics de santé") et Hélène Delmotte

La loi portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires (JO du 22 juillet 2009) comporte quatre titres, que nous examinerons successivement.


On se référera également
à la décision du Conseil constitutionnel et
aux débats de GSS

Enfin, à ne pas manquer, dans le numéro de septembre de la Gazette Santé-Social : le débat « la régionalisation de la santé est-elle taboue ? »

Titre 1 : MODERNISATION DES ETABLISSEMENTS DE SANTE

Un mot d'ordre : coordination
L'article 1er de la loi vient en préciser l'esprit. Selon le nouvel article L. 6111-1 du code de la santé publique, les établissements de santé publics, privés et privés d'intérêt collectif « participent à la coordination des soins en relation avec les membres des professions de santé exerçant en pratique de ville et les établissements et services médico-sociaux, dans le cadre défini par l'agence régionale de santé en concertation avec les conseils généraux pour les compétences qui les concernent ».
Le gouvernement devra présenter avant le 15 octobre de chaque année au Parlement un rapport sur la tarification à l'activité des établissements de santé et ses conséquences sur l'activité et l'équilibre financier des établissements publics et privés. Jusqu'en 2018, ce rapport devra être transmis au Parlement en même temps que le bilan d'avancement du processus de convergence.

Obligations concernant les praticiens hospitaliers
Selon l'article 7 de la loi, il peut être interdit aux praticiens hospitaliers ayant exercé plus de cinq ans à titre permanent dans le même établissement d'ouvrir, dans un délai de deux ans suivant leur démission, un cabinet privé ou d'exercer une activité rémunérée dans un établissement de santé privé à but lucratif, un laboratoire privé d'analyses de biologie médicale ou une officine de pharmacie où ils peuvent entrer en concurrence directe avec l'établissement public dont ils sont démissionnaires (article L. 6152-5-1 CSP).

La nouvelle gouvernance des établissements publics de santé
La loi s'inscrit dans un mouvement de réforme initié par la loi n°2003-1199 du 18 décembre 2003 de financement de la sécurité sociale pour 2004 qui a notamment introduit la tarification à l'activité (T2A). Inscrite dans le plan « Hôpital 2007 », l'ordonnance n°2005-406 du 2 mai 2005 avait déjà permis d'engager une démarche globale de changement pour moderniser la gestion hospitalière, notamment à travers la mise en place d'une « nouvelle gouvernance » destinée à renforcer la direction administrative des établissements et les équipes médicales afin de donner à l'hôpital plus de souplesse, de réactivité et d'efficacité.

Du rapport Larcher au projet de loi
Lors de son déplacement au centre hospitalier de Dunkerque, en mai 2007, le président de la République avait annoncé une concertation sur les missions de l'hôpital et demandait à l'ensemble des professionnels de santé de réfléchir aux changements nécessaires pour que le système de santé réponde, avec qualité et égalité, aux besoins de la population.
Dans ce cadre, il confiait également, par lettre de mission en date du 12 octobre 2007, à une commission présidée par Gérard Larcher et composée de 23 personnalités une mission d'animation de la réflexion et de proposition.
A l'issue de ses travaux et des débats menés en régions, cette commission remettait son rapport au Premier ministre le 10 avril 2008. L'un des volets de ce rapport était consacré à la gouvernance des établissements publics de santé.
La commission Larcher, après avoir dressé le constat des évolutions législatives de ces dernières années en matière de gouvernance des établissements publics de santé, concluait à la nécessité d'une clarification des rôles des différents acteurs et proposait une évolution fondée sur trois piliers complémentaires :
1 - un directeur conforté et responsabilisé ;
2 - un organe délibérant recentré sur la définition d'orientations stratégiques ;
3 - un conseil exécutif resserré impliquant fortement les médecins.

Un autre objectif annoncé de la réforme était de rénover le fonctionnement des établissements de santé.
Dans ce but, le projet de loi ambitionnait de redéfinir les missions de service public des établissements de santé, de les confier aux établissements de santé privés en cas d'insuffisance de l'offre de soins publics et de moderniser le statut des établissements publics de santé.
A ce titre, le chapitre II du titre I de la loi "HPST" (articles 8 à 21) redéfinit les instances de direction et d'administration des établissements publics de santé et modifie, en conséquence, les articles L. 6143-1 et suivants du code de la santé publique (CSP).
La loi substitue à l'organisation antérieure (reposant sur un conseil d'administration, un conseil exécutif et un directeur), une nouvelle organisation centrée sur le directeur d'établissement, assisté d'un directoire et d'un conseil de surveillance.

Un directeur conforté et renforcé
L'article 10 de la loi, qui réécrit l'article L. 6143-7 du CSP relatif aux pouvoirs du directeur, s'inscrit dans une tendance, déjà ancienne, de renforcement progressif des compétences du directeur de l'hôpital, tout en lui faisant réaliser une avancée significative.

Désormais le directeur conduit la politique générale de l'établissement et préside le directoire. La loi marque ainsi une évolution notable en transférant au directeur l'essentiel des pouvoirs qui restaient détenus par le conseil d'administration. La première phrase du premier alinéa du texte proposé pour l'article L. 6143-7 CSP désigne très clairement le directeur comme « l'héritier » du conseil d'administration en lui confiant le soin de « conduire la politique générale de l'établissement ». Comme le souligne le premier alinéa de l'article L. 6143-7 du CSP, le directeur est désormais seul compétent pour régler les affaires de l'établissement, sous réserve des attributions dévolues au conseil de surveillance et des attributions pour lesquelles le directeur doit procéder à une concertation préalable avec le directoire.

Comme par le passé, le directeur représente l'établissement dans tous les actes de la vie civile et agit en justice au nom de l'établissement. Il est également l'ordonnateur de l'état de prévision des recettes et des dépenses (EPRD). Il nomme les personnels non médicaux et a autorité sur l'ensemble des personnels de l'établissement.
Mais alors que le directeur était chargé de préparer et d'exécuter les délibérations du conseil d'administration, il est désormais investi d'une compétence générale pour connaître des affaires de l'établissement autres que celles réservées au conseil de surveillance.

En particulier, la loi HPST renforce les pouvoirs du directeur concernant l'organisation interne de l'établissement. Tout établissement public de santé, y compris les hôpitaux locaux, doit s'organiser en pôles.
L'article L. 6146-1 du CSP prévoit ainsi que le directeur (en lieu et place de l'ancien conseil d'administration) définit l'organisation de l'établissement en pôles d'activité conformément au projet médical d'établissement, après avis du président de la commission médicale d'établissement et, dans les CHU, du directeur de l'UFR médicale.

C'est également le directeur qui a désormais compétence pour nommer les chefs de pôles sur présentation, s'agissant des chefs de pôle clinique ou médico-technique, d'une liste élaborée par le président de la CME. Les autres chefs de pôles (administratifs, logistiques, etc.) sont nommés directement par le directeur.
L'article L. 6146-1 du CSP prévoit également la parution d'un décret qui définira les conditions dans lesquelles, le directeur pourra demander au président de la CME l'établissement d'une nouvelle liste, et en cas de désaccord persistant, nommer les chefs de pôle de son choix.

Le dispositif de contractualisation interne entre l'établissement et le chef de pôle est également maintenu, mais, là encore, il n'est plus prévu d'intervention du président de la CME en qualité de cocontractant. Celui-ci sera seulement consulté pour avis afin de vérifier la cohérence du projet de contrat de pôle avec le projet médical. Dans les CHU, le projet de contrat de pôle est également soumis pour avis au directeur de l'UFR médical.
De façon strictement similaire aux fonctions qu'il exerçait vis-à-vis du conseil d'administration, le directeur prépare les travaux du conseil de surveillance, y assiste et exécute ses délibérations.
L'article L. 6143-7, alinéa 2, du CSP consacre, de manière expresse, le pouvoir de nomination du directeur dans l'établissement public en précisant que « le directeur dispose d'un pouvoir de nomination dans l'établissement » qui était déjà consacré, dans le cadre du statut de la fonction publique, par les lois des 13 juillet 1983 et 9 janvier 1986.
Désormais, le CSP précise que le directeur propose au directeur général du centre national de gestion, la nomination des directeurs adjoints et des directeurs des soins de l'établissement, après avis de la commission administrative paritaire compétente.

De la même façon, son rôle est renforcé en matière de gestion du personnel. L'article L. 6143-7, alinéa 3, du CSP dispose ainsi que c'est le directeur qui propose au directeur général du centre national de gestion, sur proposition du chef de pôle, lorsqu'il existe, et après avis du président de la commission médicale d'établissement, la nomination, dans les conditions fixées par voie réglementaire, du personnel médical, pharmaceutique et odontologique qui exerce tout ou partie de ses activités dans l'établissement public de santé.

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Les conditions de nomination du directeur sont également modifiées
L'article L. 6143-7-2 du CSP prévoit désormais que le directeur est nommé :
- par décret sur le rapport du ministre chargé de la santé et du ministre chargé de l'université et de la recherche dans le cas des CHU,
- par décret sur le rapport du ministre de la santé pour les centres hospitaliers régionaux,
Et pour les autres établissements par arrêté du directeur général du centre national de gestion sur une liste, comportant au moins trois noms, établie par le directeur de l'agence régionale de santé, et après avis du président du conseil de surveillance.
L'article 11 de la loi HPST modifie également l'article 3 de la loi du 9 janvier 1986 relative à la fonction publique hospitalière en autorisant, par dérogation à l'article 3 du titre Ier du statut général des fonctionnaires, que des personnes n'ayant pas la qualité de fonctionnaire soient nommées dans les emplois de directeurs d'établissements publics de santé.

Le directeur peut, dans l'intérêt du service, être révoqué par décision de l'autorité investie du pouvoir de nomination, après avis du conseil de surveillance.

Du conseil exécutif au directoire

L'article L. 6143-6-1 ancien du code de la santé publique qui prévoyait l'existence, dans tous les établissements publics de santé autres que les hôpitaux locaux, d'un conseil exécutif, présidé par le directeur et composé à parité de représentants de la direction administrative de l'établissement et des personnels médicaux est supprimé.
L'article 10 de la loi (articles L. 6143-7-4 et L. 6143-7-5 du CSP) lui substitue un « directoire » dont la composition et les attributions sont réduites.
Alors que le conseil exécutif était composé, au maximum de 12 membres (16 membres dans les CHU) en application de l'article D. 6143-33 du CSP, le directoire voit sa composition uniformément fixée, par la loi, à 7 membres (9 membres dans les CHU).
Par ailleurs, le nouvel article L. 6143-7-5 du CSP ne prévoit plus l'exigence d'une composition paritaire du directoire.
Si la loi continue d'imposer la présence d'un noyau dur de représentants des personnels médicaux, membres de droit, elle renforce le pouvoir du directeur pour nommer et, le cas échéant révoquer, après information du conseil de surveillance, les autres membres du directoire, tout en exigeant que le directoire soit composé, en majorité, des représentants du personnel médical, pharmaceutique, maïeutique et ondotologique.

Composition du directoire - article L. 6143-7-5 du CSP.

Etablissements publics de santé

- Directeur de l'établissement (président du directoire)
- Président de la CME (vice-président du directoire)
- Président de la commission des soins infirmiers, de rééducation et médico-techniques - Président de la commission des soins infirmiers, de rééducation et médico-techniques
- Membres nommés par le directeur (lorsque ces personnes appartiennent au personnel médical, celui-ci doit choisir dans une liste établie par le président de la CME) 1

Centres hospitaliers universitaires
- Directeur de l'établissement
(président du directoire)
- Président de la CME (1er vice-président du directoire)
- Directeur de l'UFR ou président du comité de coordination de l'enseignement médical (vice-président doyen)
- Vice-président chargé de la recherche (nommé par le directeur sur proposition conjointe)
- Membres nommés par le directeur (lorsque ces personnes appartiennent au personnel médical, celui-ci doit choisir dans une liste établie conjointement par le président de la CME et le directeur de l'UFR). 1

(1). Un décret viendra préciser les conditions dans lesquelles le directeur pourra demander aux personnes compétentes une nouvelle liste des personnels médicaux susceptibles d'être nommés membres du directoire et, en cas de désaccord persistant, la nomination des personnes de son choix.

Le directoire voit également ses attributions réduites
Alors que l'ancien conseil exécutif était chargé de préparer les mesures nécessaires à l'élaboration et à la mise en œuvre du projet d'établissement, de la préparation du projet médical et des plans de formation, de contribuer à l'élaboration et la mise en œuvre du plan de sauvegarde et de redressement, de formuler un avis sur la nomination des responsables de pôle d'activité, et des professionnels de santé appelés à travailler conjointement avec la commission des soins infirmiers, le directoire voit sa mission significativement réduite à l'approbation du projet médical, la préparation du projet d'établissement et à une fonction de conseil au directeur dans la gestion et la conduite de l'établissement.
Le directoire est également appelé à donner son avis préalablement à l'exercice, par le directeur, de certaines de ses compétences prévues aux 1° à 15° de l'article L. 6143-7 du CSP. Le législateur a ainsi prévu que, dans ces matières, le directeur déciderait après concertation avec le directoire.

Du conseil d'administration au conseil de surveillance

Conformément au modèle traditionnel de gouvernance des établissements publics, les établissements publics de santé étaient dotés, depuis la loi du 31 décembre 1970, d'un organe délibérant, « le conseil d'administration », dont le directeur était à la fois l'autorité responsable et l'exécutif.
L'article 9 de la loi (articles L. 6143-1 et L. 6143-5 du CSP) substitue au conseil d'administration un conseil de surveillance, dont les attributions sont recentrées sur les orientations stratégiques de l'établissement et le contrôle permanent de l'établissement.
Poursuivant le mouvement initié par l'ordonnance n°2005-406 du 2 mai 2005 qui avait déjà entendu recentrer les missions du conseil d'administration des établissements publics de santé sur la définition de la stratégie de l'établissement et l'évaluation et le contrôle de sa politique », le nouvel article L. 6143-1 du CSP réduit encore le rôle de ce conseil de surveillance.

L'ordonnance n°2005-406 du 2 mai 2005 avait déjà entendu recentrer les missions du conseil d'administration sur la définition des orientations stratégiques de l'établissement, l'évaluation et le contrôle de sa politique, cette volonté ne s'était pas traduite dans les textes. Le conseil d'administration était demeuré, même après l'intervention de ce texte, investi d'un réel pouvoir d'administration et s'était même vu conforter dans ces attributions en se voyant offrir de nouvelles attributions (organisation en pôles des établissements, définition de la politique de contractualisation interne, l'affectation du résultat d'exploitation, élaboration de la politique sociale).

L'énoncé des attributions du conseil de surveillance est nettement plus bref que celui de l'ancien conseil d'administration. Le conseil de surveillance est désormais chargé de se prononcer sur la stratégie de l'établissement public de santé, de contrôler sa gestion et d'intervenir, à titre consultatif, sur diverses questions.

  • Au titre de la stratégie de l'établissement, le conseil de surveillance délibère sur
    - le projet d'établissement défini à l'article L. 6143-2 du CSP
    - la convention constitutive des CHU
    - les conventions à intervenir avec les syndicats hospitaliers
    - la participation de l'établissement à une communauté hospitalière de territoire
    - les statuts des fondations hospitalières créées par l'établissement
  • Au titre du contrôle de la gestion de l'établissement, il délibère sur
    - le compte financier et l'affectation des résultats
    - le rapport annuel sur l'activité de l'établissement
    - les conventions à intervenir, de manière directe ou indirecte, entre l'établissement et les membres du directoire ou du conseil de surveillance (art. L. 6143-3-2)
    - la nomination du commissaire aux comptes lorsque les comptes de l'établissement sont soumis à certification

Le conseil de surveillance opère, à tout moment, les vérifications et contrôles qu'il juge opportuns et peut se faire communiquer les documents qu'il estime nécessaires à l'accomplissement de sa mission. Il entend le directeur sur l'état des prévisions de recettes et de dépenses ainsi que sur le programme d'investissement.

  • Enfin, le conseil de surveillance est obligatoirement consulté sur
    - la politique d'amélioration continue de la qualité et de la sécurité des soins, la gestion des risques, les conditions d'accueil et de prise en charge des usagers
    - les acquisitions, aliénations, échanges d'immeubles et leur affectation, les baux de plus de dix-huit ans, les baux emphytéotiques et les contrats de partenariat
    - le règlement intérieur de l'établissement

La loi modifie également la composition du conseil de surveillance.
Comme antérieurement le conseil d'administration, sa composition est tripartite et associe des élus locaux, des représentants des personnels et des personnalités qualifiées.
Chacune des catégories de représentants ne peut comporter plus de 5 membres. Dans les faits, le conseil de surveillance ne peut donc comporter plus de 15 membres à voix délibératives.
Alors que le conseil d'administration des établissements publics de santé comportait un effectif de 18 (hôpitaux locaux), 22 (centres hospitaliers et centres hospitaliers régionaux) et 31 (CHU) membres et ne prévoyait une représentation paritaire qu'en ce qui concerne les élus locaux et les représentants des personnels, le nouvel article L. 6143- CSP resserre, quelle que soit la nature de l'établissement public de santé, la composition du conseil de surveillance.

Le conseil de surveillance reste, comme le conseil d'administration, composé de trois collèges. Mais, désormais, le nombre de représentants issus de chaque collège doit être identique. La loi met ainsi fin à la sous-représentation des personnalités qualifiées, qui, dans les textes antérieurs, étaient au nombre de six, quel que soit le type d'établissement.
- Le collège des élus locaux, composé de cinq membres au plus, compte au moins parmi ses membres le maire de la commune siège de l'établissement et le président du conseil général ou leurs représentants.
- Le collège des représentants du personnel, également composé de cinq membres au plus, comporte au moins un représentant de la commission des soins infirmiers et, à parité, des représentants des personnels médicaux désignés par la CME et des personnels non médicaux désignés par les organisations syndicales les plus représentatives.
La représentativité des organisations syndicales est appréciée compte tenu des résultats obtenus lors des dernières élections au comité technique d'établissement.
- Le collège des personnalités qualifiées (cinq membres au plus) comporte également deux personnalités désignées par le directeur de l'ARS ainsi que deux représentants des usagers et une personnalité qualifiée désignés par le préfet.

Dans la mesure où le collège des personnalités, tel que défini par la loi comporte obligatoirement cinq membres, les deux autres collèges (élus et représentants des personnels) devront également comporter cinq membres afin de respecter l'exigence d'identité de composition de chacun des collèges.

A la différence de la présidence du conseil d'administration des établissements de santé communaux et départementaux qui, en vertu de l'ancien article L. 6143-5 du CSP, était en principe, réservée aux maires et aux présidents de conseils généraux, la présidence du conseil de surveillance pourra, comme cela était déjà le cas des établissements de santé intercommunaux et interdépartementaux, être dévolue à un membre de la catégorie des représentants des collectivités locales ou à un membre de la catégorie des représentants des personnalités qualifiées et des représentants des usagers.

Le conseil de surveillance des établissements publics de santé compte également différents membres ayant voix consultative :
- le directeur général de l'agence régionale de santé,
- le représentant de la structure chargée de la réflexion d'éthique (lorsqu'elle existe),
- le directeur de la caisse d'assurance maladie désignée en application du premier alinéa de l'article L. 174-2 du code de la Sécurité sociale,
- dans le cas des CHU, le directeur de l'UFR ou le président du comité de coordination de l'enseignement médical siège au conseil de surveillance avec voix consultative.
- dans les établissements délivrant des soins de longue durée ou gérant un établissement d'hébergement pour personnes âgées mentionné au 6° du I de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles, un représentant des familles de personnes accueillies participe, avec voix consultative, aux réunions du conseil de surveillance.

L'article L. 6143-6 du CSP relatif aux incompatibilités affectant les membres du conseil de surveillance est entièrement réécrit, mais l'essentiel du régime juridique des incompatibilités demeure néanmoins inchangé.

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Convention de communauté hospitalière de territoire
L'article 22 de la loi traite de la coopération entre établissements de santé. Des établissements publics de santé peuvent conclure une convention de communauté hospitalière de territoire afin de mettre en œuvre une stratégie commune et de gérer en commun certaines fonctions et activités grâce à des délégations ou des transferts de compétences entre les établissements et grâce à la télémédecine. Un établissement public de santé ne peut être partie qu'à une seule convention de communauté hospitalière de territoire. Un ou plusieurs établissements publics médico-sociaux peuvent participer aux actions menées dans le cadre d'une convention de communauté hospitalière de territoire (article L. 6132-1 CSP). Les modalités de création de la convention de communauté hospitalière de territoire sont précisées aux articles L. 6132-2 et s. CSP, celles de sa résiliation à l'article L. 6132-7 CSP.

Jusqu'au 31 décembre 2012, une partie des crédits d'aide à la contractualisation et des crédits du fonds pour la modernisation des établissements de santé publics et privés sont prioritairement affectés au soutien des établissements s'engageant dans des projets de coopération. Les agences régionales de santé s'assurent que les établissements participant à un projet de communauté hospitalière de territoire et aux groupements de coopération sanitaire bénéficient d'un financement majoré de 15%

Groupements de coopération sanitaire
L'article 23 traite des groupements de coopération sanitaire. Le groupement de coopération sanitaire de moyens a pour objet de faciliter, de développer ou d'améliorer l'activité de ses membres (article L. 6133-1 CSP). Un groupement de coopération sanitaire de moyens peut être constitué pour organiser ou gérer des activités administratives, logistiques, techniques, médico-techniques, d'enseignement ou de recherche ; réaliser ou gérer des équipements d'intérêt commun et permettre les interventions communes de professionnels médicaux et non médicaux exerçant dans les établissements ou centres de santé membres du groupement ainsi que des professionnels libéraux membres du groupement. Il poursuit un but non lucratif. Les modalités de constitution d'un groupement de coopération sanitaire sont précisées aux articles L. 6133-2 et s. CSP.

La rémunération des médecins libéraux est versée par le groupement de coopération sanitaire lorsque ce dernier est financé par application des tarifs des prestations d'hospitalisation des établissements publics ou privés non lucratifs. Le tarif de l'acte ainsi versé au médecin est réduit d'une redevance représentative des moyens mis à sa disposition par le groupement de coopération sanitaire.

Lorsque le groupement de coopération sanitaire est financé par application des tarifs des prestations d'hospitalisation des établissements privés n'ayant pas conclu un contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens, la rémunération des médecins est versée sous la forme d'honoraires directement par l'assurance maladie au médecin lorsque celui-ci est libéral et au groupement de coopération sanitaire lorsque le médecin est salarié. Dans un délai de trois ans, les syndicats interhospitaliers seront transformés, sans dissolution ni création d'une personne morale nouvelle, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, soit en communauté hospitalière de territoire, soit en groupement de coopération sanitaire, soit en groupement d'intérêt public.

Coordination de l'évolution du système de santé
L'article 23 détaille également la coordination de l'évolution du système de santé par l'agence régionale de santé.
Le directeur général de l'agence régionale de santé coordonne l'évolution du système hospitalier, notamment en vue de l'adapter aux besoins de la population et d'assurer l'accessibilité aux tarifs opposables, de garantir la qualité et la sécurité des soins, d'améliorer l'organisation et l'efficacité de l'offre de soins et de maîtriser son coût et améliorer les synergies interrégionales en matière de recherche (article L. 6131-1 CSP). A cette fin, le directeur général de l'agence régionale de santé peut demander à des établissements publics de santé de conclure une convention de coopération, une convention de communauté hospitalière de territoire, de créer un groupement de coopération sanitaire ou un groupement d'intérêt public ou de prendre une délibération tendant à la création d'un nouvel établissement public de santé par fusion des établissements concernés (article L. 6131-2 CSP). Les articles 6131-2 et s. détaillent la procédure ainsi que les pouvoirs du directeur de l'ARS lorsque sa demande n'est pas suivie d'effet.

Le directeur général de l'agence régionale de santé peut demander à un établissement concerné par une opération de restructuration la suppression d'emplois et la révision de son contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens. Il réduit en conséquence le montant de sa dotation de financement des missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation ou des crédits de sa dotation annuelle de financement (article L. 6131-5 CSP).

Conférence nationale de santé
La Conférence nationale de santé comprend au moins un représentant d'un établissement assurant une activité de soins à domicile (article 27 de la loi ; article L. 1411-3 CSP).

Gouvernance des établissements publics de santé
Il est créé un comité de suivi de la réforme de la gouvernance des établissements publics de santé, placé auprès du ministre chargé de la santé (article 35 de la loi).

Titre 2 : L'ACCES DE TOUS A DES SOINS DE QUALITE

Accès aux soins de premier recours
L'article 36 de la loi définit l'accès aux soins de premier recours et la prise en charge continue des malades (article L. 1411-11 CSP). Les professionnels de santé, dont les médecins traitants, ainsi que les centres de santé concourent à l'offre de soins de premier recours en collaboration et, le cas échéant, dans le cadre de coopérations organisées avec les établissements et services de santé, sociaux et médico-sociaux.
L'article L. 4130-1 CSP définit les missions du médecin généraliste de premier recours.

Les pôles de santé assurent des activités de soins de premier recours, de second recours (article L. 1411-12 CSP), et peuvent participer aux actions de prévention, de promotion de la santé et de sécurité sanitaire prévues par le schéma régional de prévention (article 40 de la loi). « Ils sont constitués entre des professionnels de santé et, le cas échéant, des maisons de santé, des centres de santé, des réseaux de santé, des établissements de santé, des établissements et des services médico-sociaux, des groupements de coopération sanitaire et des groupements de coopération sociale et médico-sociale » (article L. 6323-4 CSP).

Nombre d'internes
L'article 43 de la loi précise qu'un arrêté du ministre chargé de l'enseignement supérieur et du ministre chargé de la santé détermine pour une période de cinq ans le nombre d'internes à former par spécialité (en particulier celle de médecine générale), et par subdivision territoriale, compte tenu de la situation de la démographie médicale dans les différentes spécialités concernées et de son évolution au regard des besoins de prise en charge spécialisée.
Un deuxième arrêté déterminera les modalités en fonction desquelles tout étudiant qui présente le concours d'entrée en deuxième année d'études de médecine est informé de l'objectif de la collectivité nationale de rééquilibrage de la densité médicale sur le territoire et des mesures permettant d'y concourir. Enfin, un troisième arrêté précisera le nombre de postes d'interne offerts chaque année par discipline ou spécialité et par centre hospitalier universitaire. Des décrets en Conseil d'Etat détermineront notamment les subdivisions territoriales, les modalités des épreuves d'accès au troisième cycle et de choix d'une spécialité par les internes.

Des décrets en Conseil d'Etat pourront déterminer les conditions dans lesquelles l'expérience acquise au cours de l'exercice professionnel peut être validée, en tout ou partie, en vue de l'obtention d'un diplôme de formation médicale spécialisé, dans une limite compatible avec les besoins de soins de la population et après une durée minimale d'exercice de la spécialité correspondant à la formation initiale.
Les internes pourront effectuer leur stage auprès de praticiens des centres de santé ou des structures de soins alternatives à l'hospitalisation agréés.

Le contrat santé solidarité
Le schéma régional d'organisation des soins détermine les zones dans lesquelles le niveau de l'offre de soins médicaux est particulièrement élevé (article 43 de la loi). A l'échéance d'un délai de trois ans à compter de l'entrée en vigueur du schéma régional d'organisation des soins, le directeur général de l'agence régionale de santé évalue la satisfaction des besoins en implantations pour l'exercice des soins de premier recours.
S'il apparaît que les besoins ne sont pas satisfaits, le directeur général de l'ARS peut, après avis de la conférence régionale de la santé et de l'autonomie, de l'union régionale des professionnels de santé compétente pour les médecins et des organisations les plus représentatives des étudiants en médecine, des internes et des chefs de clinique, proposer aux médecins exerçant dans les zones particulièrement bien dotées d'adhérer à un contrat santé solidarité par lequel ils s'engagent à contribuer à répondre aux besoins de santé de la population des zones où les besoins en implantations ne sont pas satisfaits. Les médecins qui refusent de signer un tel contrat, ou qui ne respectent pas les obligations qu'il comporte pour eux, s'acquittent d'une contribution forfaitaire annuelle, au plus égale au plafond mensuel de la Sécurité sociale (article L. 1434-8 CSP).

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Le contrat d'engagement de service public
L'article 46 de la loi détaille le contenu et les objectifs du contrat d'engagement de service public applicable à l'issue de l'année universitaire 2009-2010.
Chaque année, un arrêté du ministre chargé de la santé et du ministre chargé de la sécurité sociale déterminera le nombre d'étudiants qui peuvent signer un contrat d'engagement de service public avec le Centre national de gestion des praticiens hospitaliers et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière (article L. 632-6 code de l'éducation).

Recrutement des enseignants et des chefs de clinique
L'article 47 de la loi prévoit qu'à compter de la rentrée universitaire 2009-2010, et pendant quatre ans, le nombre annuel d'emplois créés ne peut être inférieur à vingt pour les professeurs des universités de médecine générale, trente pour les maîtres de conférences des universités de médecine générale et cinquante pour les chefs de clinique des universités de médecine générale.

Continuité des soins
La continuité des soins aux malades est assurée, quelles que soient les circonstances. Lorsque le médecin se dégage de sa mission de soins pour des raisons professionnelles ou personnelles, il doit indiquer à ses patients le confrère auquel ils pourront s'adresser en son absence. Le médecin doit également informer le conseil départemental de l'ordre de ses absences programmées dans les conditions et selon les modalités définies par décret (article 49 de la loi ; article L. 6315-1 CSP).

Coopération entre professionnels de santé
L'article 51 de la loi traite de la coopération entre professionnels de santé. Ceux-ci peuvent s'engager dans une démarche de coopération ayant pour objet d'opérer entre eux des transferts d'activités ou d'actes de soins ou de réorganiser leurs modes d'intervention auprès du patient. Le patient en est informé (article L. 4011-1 CSP). Les professionnels de santé soumettent à l'agence régionale de santé des protocoles de coopération. Le directeur général de l'agence les autorisent après avis conforme de la Haute Autorité de santé (article L. 4011-2 CSP).

Dépassements d'honoraires
A défaut de conclusion avant le 15 octobre 2009 d'un avenant conventionnel (articles L 162-5 et L 162-14-1 du code de la sécurité sociale), autorisant des médecins relevant de certaines spécialités, sous des conditions tenant notamment à leur formation, à leur expérience professionnelle, à la qualité de leur pratique et à l'information des patients sur leurs honoraires, à pratiquer de manière encadrée des dépassements d'honoraires pour une partie de leur activité, les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale modifieront par arrêté pendant un délai de quatre mois, les dispositions de la convention nationale des médecins généralistes et spécialistes conclue le 12 janvier 2005.

Les refus de soins et les discriminations
L'article 54 de la loi traite des refus de soins : le nouvel article L. 1110-3 CSP précise que toute personne qui s'estime victime d'un refus de soins illégitime peut saisir le directeur de l'organisme local d'assurance maladie ou le président du conseil territorialement compétent de l'ordre professionnel concerné. Cette saisine vaut dépôt de plainte. Le déroulement de la procédure est détaillé dans l'article.
L'article L. 162-1-14-1 du code de la sécurité sociale précise par ailleurs les comportements des professionnels de santé qui peuvent faire l'objet d'une sanction, prononcée par le directeur de l'organisme local d'assurance maladie.

Consultation de prévention
Les assurés ou ayants droit âgés de 16 à 25 ans peuvent bénéficier chaque année d'une consultation de prévention, réalisée par un médecin généraliste, pour laquelle ils sont dispensés de l'avance des frais (article 55 de la loi, article L. 162-1-18 CSS).

Déontologie médicale
Les directeurs des organismes locaux d'assurance maladie et les services médicaux de ces organismes sont tenus de communiquer à l'ordre compétent les informations qu'ils ont recueillies dans le cadre de leur activité et qui sont susceptibles de constituer un manquement à la déontologie de la part d'un professionnel de santé inscrit à un ordre professionnel.
L'ordre est tenu de faire connaître à l'organisme qui l'a saisi, dans les trois mois, les suites qu'il y a apportées (article 56 de la loi, article L. 162-1-19 CSS).

Développement professionnel continu
Les articles L. 4133-1 à L. 4133-4 du code de la santé publique traitent du « développement professionnel continu » qui constitue une obligation pour les médecins. La gestion des sommes affectées au développement professionnel continu est assurée, pour l'ensemble des professions de santé, par un organisme gestionnaire doté de la personnalité morale et administré par un conseil de gestion (article L. 4021-1 CSP).
Les auxiliaires médicaux concourent à la formation initiale des étudiants et élèves auxiliaires médicaux. A ce titre, ils peuvent accueillir, pour des stages à finalité pédagogique nécessitant leur présence constante, des étudiants et élèves auxiliaires médicaux en formation. La réalisation de ces stages ne peut avoir pour objet ou pour effet d'accroître l'activité rémunérée de ces praticiens. Les stagiaires peuvent bénéficier de l'indemnisation de contraintes liées à l'accomplissement de leurs stages, à l'exclusion de toute autre rémunération ou gratification (article L. 4381-1 CSP).

Formation initiale des sages-femmes
Selon l'article 60 de la loi, la formation initiale des sages-femmes peut être organisée au sein des universités, par dérogation à l'article L. 4151-7 CSP, sous réserve de l'accord du conseil régional. Cet accord doit notamment porter sur les modalités de financement de la formation (article L. 4151-7-1 CSP).

Formation
Parmi de nombreuses dispositions relatives aux ordres, l'article L. 4124-6-1 CSP précise que lorsque les faits reprochés à un médecin, un chirurgien-dentiste ou une sage-femme ont révélé une insuffisance de compétence professionnelle, la chambre disciplinaire de première instance peut, sans préjudice des peines qu'elle prononce éventuellement en application de l'article L. 4124-6 CSP, enjoindre à l'intéressé de suivre une formation (article 62 de la loi).

Industrie pharmaceutique
A compter de 2010, les entreprises fabriquant et commercialisant des produits de santé devront déclarer chaque année, avant le 30 juin, auprès de la Haute Autorité de santé, la liste des associations de patients qu'elles soutiennent et le montant des aides de toute nature qu'elles leur ont procurées l'année précédente. Des informations qui seront publiées par la Haute Autorité de santé (article 74 de la loi).

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Titre 3 : PREVENTION ET SANTE PUBLIQUE

Actions de prévention
L'article 81 de la loi traite de la prévention des facteurs de risques pour la santé. Une fondation va contribuer à la mobilisation des moyens nécessaires pour soutenir des actions individuelles ou collectives destinées à promouvoir la santé. Ces actions contribuent notamment à la promotion d'une alimentation équilibrée et de l'activité physique et sportive ainsi qu'à la lutte contre les addictions (article L. 1171-1 CSP). Autre aspect, un rapport précisant le nombre des malades de l'alcool, du tabac et des drogues en France sera transmis au Parlement avant le 31 décembre 2010 (article 82 de la loi).

Education thérapeutique
En matière d'éducation thérapeutique, l'article L. 1161-1 CSP précise qu'elle n'est pas opposable au malade. Elle ne peut donc pas conditionner le taux de remboursement des actes et des médicaments afférents à sa maladie. Les compétences nécessaires pour dispenser l'éducation thérapeutique du patient sont déterminées par décret. Les programmes d'éducation thérapeutique seront mis en œuvre au niveau local, après autorisation des agences régionales de santé. Ils seront proposés au malade par le médecin prescripteur, donneront lieu à l'élaboration d'un programme personnalisé et seront évalués par la Haute Autorité de santé (article L. 1161-2 CSP). En l'absence de l'autorisation de l'ARS, des sanctions pénales sont précisées à l'article L. 1162-1 (30 000 euros d'amende).

Les programmes d'action thérapeutique ne peuvent être ni élaborés, ni mis en œuvre par des laboratoires pharmaceutiques, des personnes responsables de la mise sur le marché d'un dispositif médical ou d'un dispositif médical de diagnostic in vitro ou des entreprises proposant des prestations en lien avec la santé. Ces entreprises peuvent toutefois prendre part à ces programmes, notamment pour leur financement, dès lors que des professionnels de santé et des associations les élaborent et les mettent en œuvre (article 84 de la loi, article L. 1161-4 CSP). Les promoteurs de programmes d'éducation thérapeutique du patient déjà mis en œuvre ont jusqu'au 1er janvier 2011 pour obtenir l'autorisation auprès des agences régionales de santé compétentes. Un rapport sera présenté au Parlement avant le 31 décembre 2010 sur la mise en œuvre de ces programmes et sur leurs financements.

Examen prénatal
L'article 86 de la loi prévoit qu'à l'occasion du premier examen prénatal, le médecin ou la sage-femme proposent un frottis cervico-utérin, dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de la santé.

Compétences nouvelles des sages-femmes
Parmi les nouvelles compétences des sages-femmes, figure la réalisation de consultations de contraception et de suivi gynécologique de prévention (sous réserve que la sage-femme adresse la femme à un médecin en cas de situation pathologique - article L. 4151-1 CSP), la prescription des contraceptifs intra-utérins, des diaphragmes et des capes, la première pose du diaphragme ou de la cape. Mais si les sages-femmes sont habilitées à prescrire les contraceptifs locaux et les contraceptifs hormonaux, la surveillance et le suivi biologique sont assurés par le médecin traitant.

Contraception et contraception d'urgence
L'article 87 de la loi précise que dans les services de médecine de prévention des universités, la délivrance de médicaments ayant pour but la contraception, et notamment la contraception d'urgence, s'effectue dans des conditions définies par décret. Ces services s'assurent de l'accompagnement psychologique de l'étudiant et veillent à la mise en œuvre d'un suivi médical. L'infirmière ou l'infirmier est autorisé à renouveler les prescriptions, datant de moins d'un an, de médicaments contraceptifs oraux dont la liste est fixée par arrêté du ministre chargé de la santé, après avis de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, pour une durée maximale de six mois, non renouvelable. Cette disposition est également applicable aux infirmières et infirmiers exerçant dans les établissements d'enseignement du second degré, dans les services de la protection maternelle et infantile et dans les centres de planification ou d'éducation familiale. S'agissant des contraceptifs oraux, lorsque la durée de validité d'une ordonnance datant de moins d'un an est expirée, le pharmacien peut dispenser les médicaments nécessaires à la poursuite du traitement, s'ils figurent sur une liste fixée par arrêté du ministre chargé de la santé après avis de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, pour une durée supplémentaire non renouvelable de six mois.

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Registre national des psychothérapeutes
L'article 52 de la loi n°2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique a été modifié par l'article 91 de la loi. Un décret en Conseil d'Etat devra préciser les conditions de formation théorique et pratique en psychopathologie clinique que doivent remplir les professionnels souhaitant s'inscrire au registre national des psychothérapeutes. Il définira les conditions dans lesquelles les ministres chargés de la santé et de l'enseignement supérieur agréent les établissements autorisés à délivrer cette formation. L'accès à cette formation est réservé aux titulaires d'un diplôme de niveau doctorat donnant le droit d'exercer la médecine en France ou d'un diplôme de niveau master dont la spécialité ou la mention est la psychologie ou la psychanalyse. Ce décret précisera également les possibilités de dispense totale ou partielle pour la formation en psychopathologie clinique pour certains professionnels et les dispositions transitoires dont peuvent bénéficier les professionnels justifiant d'au moins cinq ans de pratique de la psychothérapie à la date de publication du décret.

Accueil familial
L'instruction de la demande, la délivrance et le renouvellement de l'agrément aux accueillants familiaux, ainsi que le contrôle et le suivi social et médico-social des personnes accueillies, peuvent être assumés par l'établissement ou le service de soins. Les accueillants familiaux thérapeutiques employés par cet établissement ou service sont des agents non titulaires de cet établissement ou service (article 92 de la loi).

Lutte contre l'alcool
L'interdiction de délivrer de l'alcool à des mineurs a été renforcée. Un modèle spécifique d'affiche rappelant cette interdiction doit par exemple être apposé dans les débits de boissons à emporter (article L. 3342-4 CSP). Les sanctions en cas de vente à des mineurs de boissons alcooliques ont été durcies (articles L. 3353-3 et s. CSP), ainsi que les conditions de vente d'alcool dans les points de vente de carburant. L'article 95 prévoit que sans préjudice du pouvoir de police générale, le maire peut fixer par arrêté une plage horaire, qui ne peut être établie en deçà de 20 heures et au-delà de 8 heures, durant laquelle la vente à emporter de boissons alcooliques sur le territoire de sa commune est interdite. La pratique des « Happy Hours » a également été encadrée (article 96) : si le débitant propose des boissons alcooliques à prix réduits pendant une période restreinte, il doit également proposer à prix réduit les boissons non alcooliques.

Lutte contre le tabac
En matière de lutte contre le tabagisme, l'article 98 de la loi prévoit que la distribution à la vente ou l'offre à titre gratuit de cigarettes aromatisées dont la teneur en ingrédients donnant une saveur sucrée ou acidulée dépasse des seuils fixés par décret sont interdites. Il est interdit de vendre ou d'offrir gratuitement, dans les débits de tabac et tous commerces ou lieux publics, des produits du tabac ou ses ingrédients à des mineurs de moins de 18 ans (au lieu de 16 ans).

Lutte contre le plomb et l'amiante
Dans les zones délimitées pour la réalisation d'une opération d'amélioration de l'habitat, l'autorité administrative compétente prescrit aux propriétaires bénéficiant de subventions de travaux pour sortie d'insalubrité la réalisation et la communication d'un constat de risque d'exposition au plomb dans les immeubles affectés à l'usage d'habitation construits avant le 1er janvier 1949 (article 104 de la loi). L'article 105 précise pour sa part les obligations des propriétaires ou à défaut des exploitants en matière de détection de présence d'amiante.

Propagation internationale des maladies
Les obligations dans le cadre de la lutte contre la propagation internationale des maladies ont été renforcées par l'article 107 de la loi. En cas de voyage international, les exploitants de moyens de transport, d'infrastructures de transport et d'agences de voyages sont tenus d'informer leurs passagers ou leurs clients des risques pour la santé publique constatés par les autorités sanitaires dans les lieux de destination ou de transit. Ils les informent également des recommandations à suivre et des mesures sanitaires mises en place contre ces risques.

En cas d'identification d'un risque sanitaire grave postérieurement à un voyage et pour permettre la mise en place des mesures d'information et de protection nécessaires, ces exploitants doivent communiquer aux autorités sanitaires les données permettant l'identification des passagers exposés ou susceptibles d'avoir été exposés au risque.

Prévention de l'obésité
L'article 112 de la loi présente la prévention de l'obésité et du surpoids comme « une priorité de la politique de santé publique ». Il revient à l'Etat d'organiser et de coordonner la prévention, le traitement et la lutte contre l'obésité et le surpoids. Les campagnes d'information sont validées par l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé. Elles doivent également porter sur « l'acceptation des personnes obèses ou en surpoids et la lutte contre les discriminations qui leur sont faites ». Par ailleurs, l'utilisation du titre-restaurant a été étendue auprès des détaillants en fruits et légumes dans des conditions qui seront fixées par décret (article 113).

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Titre 4 : ORGANISATION TERRITORIALE DU SYSTEME DE SANTE

Création des agences régionales de santé
L'article 118 précise que dans chaque région et en Corse, une agence régionale de santé a pour mission de définir et de mettre en œuvre un ensemble coordonné de programmes et d'actions concourant à la réalisation, à l'échelon régional et infrarégional des objectifs de la politique nationale de santé (article L. 1411-1 du présent code), des principes de l'action sociale et médico-sociale (articles L. 116-1 et L. 116-2 du code de l'action sociale et des familles) et des principes fondamentaux affirmés à l'article L. 111-2-1 CSS, à savoir le caractère universel, obligatoire et solidaire de l'assurance maladie. Les agences régionales de santé contribuent au respect de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie.

Les agences régionales de santé sont chargées, en tenant compte des spécificités de chaque région, de mettre en œuvre au niveau régional la politique de santé publique définie en liaison avec les autorités compétentes dans les domaines de la santé au travail, de la santé scolaire et universitaire et de la protection maternelle et infantile; de réguler, d'orienter et d'organiser, notamment en concertation avec les professionnels de santé, l'offre de services de santé, de manière à répondre aux besoins en matière de soins et de services médico-sociaux, et à garantir l'efficacité du système de santé (article L. 1431-2 CSP).
Un décret peut créer des agences interrégionales de santé et confier des compétences interrégionales à une ou plusieurs agences régionales de santé (article L. 1431-3 CSP).

Les agences régionales de santé sont des établissements publics de l'Etat à caractère administratif. Elles sont placées sous la tutelle des ministres chargés de la santé, de l'assurance maladie, des personnes âgées et des personnes handicapées. Les agences régionales de santé sont dotées d'un conseil de surveillance et dirigées par un directeur général.

Auprès de chaque agence régionale de santé sont constituées :

  • une conférence régionale de la santé et de l'autonomie, organisme consultatif composé de plusieurs collèges qui concourt, par ses avis, à la politique régionale de santé;
  • deux commissions de coordination des politiques publiques de santé, associant les services de l'Etat, les collectivités territoriales et leurs groupements et les organismes de sécurité sociale. Ces commissions seront compétentes pour assurer la cohérence et la complémentarité des actions dans les domaines de la prévention, de la santé scolaire, de la santé au travail et de la protection maternelle et infantile ainsi que dans le domaine des prises en charge et des accompagnements médico-sociaux.


Les agences régionales de santé mettent en place des délégations territoriales dans les départements. L'article L. 1432-2 CSP précise les missions et obligations du directeur général, l'article L. 1432-3 CSP précise la composition et les missions du conseil de surveillance de l'agence régionale de santé et l'article 1432-4 CSP le rôle de la Conférence régionale de la santé et de l'autonomie.

Les ressources de l'agence sont constituées par une subvention de l'Etat, des contributions des régimes d'assurance maladie, des contributions de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie pour des actions concernant les établissements et services médico-sociaux, des ressources propres, dons et legs et sur une base volontaire, des versements de collectivités territoriales ou d'autres établissements publics (article L. 1432-6 CSP). Le personnel de l'agence comprend des fonctionnaires, des médecins, odontologistes et pharmaciens, des agents contractuels de droit public et des agents de droit privé régis par les conventions collectives applicables au personnel des organismes de sécurité sociale (article L. 1432-9 CSP).

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Coordination des agences régionales de santé
Un conseil national de pilotage des ARS réunit des représentants de l'Etat et de ses établissements publics, dont la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, ainsi que des représentants des organismes nationaux d'assurance maladie membres de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie.
Ce Conseil donne aux agences régionales de santé les directives pour la mise en œuvre de la politique nationale de santé sur le territoire. Il veille à la cohérence des politiques qu'elles ont à mettre en œuvre en termes de santé publique, d'organisation de l'offre de soins et de prise en charge médico-sociale et de gestion du risque et il valide leurs objectifs. Il valide également toutes les instructions qui leur sont données, conduit l'animation du réseau des agences et évalue périodiquement les résultats de l'action des agences et de leurs directeurs généraux.

Le conseil national de pilotage veille à ce que la répartition entre les agences régionales de santé des financements qui leur sont attribués prenne en compte l'objectif de réduction des inégalités de santé (article L. 1433-1 CSP). Les ministres chargés de la santé, de l'assurance maladie, des personnes âgées et des personnes handicapées signent avec le directeur général de chaque agence régionale de santé un contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens de l'agence, pour une durée de quatre ans, révisable chaque année (article L. 1433-2 CSP).

Le projet régional de santé
Le projet régional de santé définit les objectifs pluriannuels des actions que mène l'agence régionale de santé dans ses domaines de compétences, ainsi que les mesures tendant à les atteindre (article L. 1434-1 CSP). Il est constitué d'un plan stratégique régional de santé, qui fixe les orientations et objectifs de santé pour la région ; de schémas régionaux de mise en œuvre en matière de prévention, d'organisation de soins et d'organisation médico-sociale et de programmes déclinant les modalités spécifiques d'application de ces schémas. Parmi ces derniers, un programme doit être consacré à l'accès à la prévention et aux soins des personnes les plus démunies et un autre programme doit être relatif au développement de la télémédecine.

Le plan stratégique régional de santé prévoit des articulations avec la santé au travail, la santé en milieu scolaire et la santé des personnes en situation de précarité et d'exclusion.
Le projet régional de santé fait l'objet d'un avis de la conférence régionale de la santé et de l'autonomie, des collectivités territoriales et du préfet de région.

Le programme pluriannuel régional de gestion du risque
Le programme pluriannuel régional de gestion du risque comprend, outre les actions nationales définies par le contrat qui détermine les objectifs pluriannuels de gestion du risque communs aux trois régimes membres de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie, des actions complémentaires tenant compte des spécificités régionales. Révisé chaque année, ce programme est intégré au projet régional de santé.

Territoires de santé et conférences de territoire
L'agence régionale de santé définit les territoires de santé pertinents pour les activités de santé publique, de soins et d'équipement des établissements de santé, de prise en charge et d'accompagnement médico-social ainsi que pour l'accès aux soins de premier recours. Les territoires de santé peuvent être infrarégionaux, régionaux ou interrégionaux. Ils sont définis après avis du préfet de région, d'une part, de la conférence régionale de la santé et de l'autonomie, d'autre part et, en ce qui concerne les activités relevant de leurs compétences, des présidents des conseils généraux de la région. Les territoires interrégionaux sont définis conjointement par les agences régionales concernées, après avis du préfet de chaque région et, en ce qui concerne les activités relevant de leurs compétences, des présidents des conseils généraux compétents sur ces territoires (article L. 1434-16 CSP).
Dans chacun des territoires de santé, le directeur général de l'ARS constitue une conférence de territoire, composée de représentants des différentes catégories d'acteurs du système de santé du territoire concerné, dont les usagers. La conférence de territoire contribue à mettre en cohérence les projets territoriaux sanitaires avec le projet régional de santé et les programmes nationaux de santé publique. La mise en œuvre du projet régional de santé peut faire l'objet de contrats locaux de santé conclus par l'agence, notamment avec les collectivités territoriales et leurs groupements, portant sur la promotion de la santé, la prévention, les politiques de soins et l'accompagnement médico-social (article L. 1434-17 CSP).

Modalités et moyens d'intervention des ARS
Les modalités et moyens d'intervention des agences régionales de santé sont définis dans quatre sections.

1. La première section - Veille, sécurité et polices sanitaires - précise les modalités de coopération entre le directeur général de l'ARS, le représentant de l'Etat territorialement compétent et les élus territoriaux concernés s'agissant de tout événement sanitaire présentant un risque pour la santé de la population ou susceptible de présenter un risque de trouble à l'ordre public. L'agence est par ailleurs associée à l'élaboration et à la mise en œuvre des programmes d'action dans les zones urbaines sensibles pour l'aménagement et le développement du territoire (article L. 1435-1 CSP).

2. La deuxième section - Contractualisation avec les offreurs de services de santé - détaille les modalités de conclusion des contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens (article L. 6114-1 CSP). L'ARS peut, avec la participation des collectivités territoriales, conclure les contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens avec des établissements et services sociaux et médico-sociaux (article L. 313-11 du code de l'action sociale et des familles) ainsi que, dans des conditions définies par décret, des contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens avec les réseaux de santé, les centres de santé, les pôles de santé et les maisons de santé. Le versement d'aides financières ou de subventions à ces services de santé par les agences régionales de santé est subordonné à la conclusion d'un contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens.

L'agence régionale de santé peut proposer aux professionnels de santé conventionnés, aux centres de santé, aux pôles de santé, aux établissements de santé, aux établissements d'hébergement pour personnes âgées et dépendantes, aux maisons de santé, aux services médico-sociaux, ainsi qu'aux réseaux de santé de son ressort, d'adhérer à des contrats ayant pour objet d'améliorer la qualité et la coordination des soins (article L. 1435-4 CSP). Ceux-ci fixent les engagements des professionnels, centres, établissements, maisons, services, pôles ou réseaux concernés et la contrepartie financière qui peut leur être associée. L'agence régionale de santé organise, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat, la mission de service public de permanence des soins.

3. La troisième précise l'accès de l'ARS aux données nécessaires à l'exercice de ses missions contenues dans les systèmes d'information des établissements de santé, des établissements et services médico-sociaux, des organismes d'assurance maladie et de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie. L'anonymat des personnes est garanti.

4. La quatrième section - Inspections et contrôles - prévoit que le directeur général de l'ARS peut désigner des inspecteurs et des contrôleurs pour contrôler l'application des règles générales d'hygiène et des lois et règlements relatifs à des sujets détaillés dans la loi (droits des personnes malades et des usagers du système de santé, protection des personnes en matière de recherche biomédicale et de médecine génétique, etc.). L'article 122 de la loi prévoit qu'avant le 15 septembre 2010, le gouvernement présente au Parlement un rapport évaluant l'intérêt qu'il y aurait à ce qu'un sous-objectif de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie identifie une enveloppe destinée à contribuer à la réduction des inégalités interrégionales de santé. Une telle enveloppe pourrait être répartie par région et déléguée aux agences régionales de santé, qui disposeraient ainsi de moyens accrus pour résorber les inégalités de santé.

Représentation des professions de santé libérales
Dans chaque région et dans la collectivité territoriale de Corse, une union régionale des professionnels de santé rassemble, pour chaque profession, les représentants des professionnels de santé exerçant à titre libéral. Ces unions régionales des professionnels de santé sont regroupées en une fédération régionale des professionnels de santé libéraux. Les unions régionales des professionnels de santé et leurs fédérations sont des associations régies par la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association (article L. 4031-1 CSP). Ces unions contribuent à l'organisation et à l'évolution de l'offre de santé au niveau régional, notamment à la préparation du projet régional de santé et à sa mise en œuvre. Elles peuvent conclure des contrats avec l'agence régionale de santé et assurer des missions particulières impliquant les professionnels de santé libéraux dans les domaines de compétence de l'agence (article L. 4031-3 CSP).

Etablissements et services médico-sociaux
L'article 124 supprime les comités régionaux de l'organisation sociale et médico-sociale (Crosms). Par ailleurs, les modalités d'élaboration des schémas d'organisation sociale et médico-sociale sont revues.
Les ministres chargés des personnes âgées et des personnes handicapées établissent, sur proposition de la CNSA lorsqu'il entre dans son champ de compétences et après avis du Comité national de l'organisation sanitaire et sociale, un schéma au niveau national pour les établissements ou services accueillant des catégories de personnes, dont la liste est fixée par décret, pour lesquelles les besoins ne peuvent être appréciés qu'à ce niveau. L'Assemblée des départements de France est tenue informée de ce schéma national.
Le directeur général de l'agence régionale de santé établit le schéma régional d'organisation médico-sociale (article L. 1434-12 CSP).

Le président du conseil général élabore les schémas, adoptés par le conseil général, pour les établissements et services de la protection de l'enfance, autres que ceux devant figurer dans les schémas nationaux (1° et 4° du I de l'article L. 312-1 du CASF). Il prend en compte les orientations fixées par le préfet. Les schémas relatifs aux personnes handicapées ou en perte d'autonomie sont arrêtés par le président du conseil général, après concertation avec le préfet et avec l'agence régionale de santé, dans le cadre de la commission de coordination des politiques publiques de santé de l'ARS chargée des prises en charge et des accompagnements médico-sociaux (2° de l'article L. 1432-1 CSP). Les représentants des organisations professionnelles représentant les acteurs du secteur du handicap ou de la perte d'autonomie dans le département ainsi que les représentants des usagers sont également consultés, pour avis, sur le contenu de ces schémas.

Pour les établissements et services qui accueillent des personnes handicapées ou des personnes âgées (2°, 3°, 5°, 6°, 7°, 11° et 12° du I de l'article L. 312-1 du CASF), le directeur général de l'agence régionale de santé établit un programme interdépartemental d'accompagnement des handicaps et de la perte d'autonomie composé d'objectifs de programmation pour la mise en œuvre du schéma régional d'organisation médico-sociale. Ce programme dresse, pour la part des prestations financées sur décision tarifaire du directeur général de l'agence régionale de santé, les priorités de financement des créations, extensions ou transformations d'établissements ou de services au niveau régional.

Lorsque les projets, y compris expérimentaux, de création, de transformation et d'extension d'établissements ou de services sociaux et médico-sociaux ainsi que les projets de lieux de vie et d'accueil font appel partiellement ou intégralement à des financements publics, les autorités (article L313-3 CASF) délivrent l'autorisation après avis d'une commission de sélection d'appel à projet social ou médico-social qui associe des représentants des usagers. L'avis de cette dernière n'est toutefois pas requis en cas d'extension inférieure à un seuil.
Les opérations de regroupement d'établissements et services préexistants sont exonérées de la procédure d'appel à projet, si elles n'entraînent pas des extensions de capacités supérieures aux seuils prévus et si elles ne modifient pas les missions des établissements et services concernés.

La création de la commission d'appel à projet, la suppression du comité régional de l'organisation sociale et médico-sociale et la nouvelle procédure d'autorisation s'appliquent aux nouvelles demandes d'autorisation, d'extension ou de transformation des établissements et services médico-sociaux déposées à compter du 1er juillet 2010. Les mandats des membres des comités régionaux de l'organisation sociale et médico-sociale, en cours ou arrivant à échéance au cours de l'année 2009 ou de l'année 2010, restent en vigueur pour l'examen des demandes déposées jusqu'au 1er juillet 2010 et ce pour une durée maximale de six mois à compter de cette date.

Désormais, les établissements et services accueillant des personnes âgées dépendantes et les établissements et services relevant de la compétence tarifaire exclusive du directeur général de l'agence régionale de santé ou du préfet de région (2°, 3°, 5°, 7°, 8°, 9°, 11°, 14° et 15° du I de l'article L. 312-1 du CASF) qui atteignent ensemble, en raison tant de leur taille que des produits de leur tarification, un certain seuil fixé par arrêté font l'objet d'un contrat d'objectifs et de moyens signé avec leur personne morale gestionnaire, qui comporte notamment des objectifs de qualité de prise en charge à atteindre. Ils peuvent disposer pour son élaboration et sa mise en œuvre des outils méthodologiques fournis par l'Agence nationale d'appui à la performance des établissements de santé et médico-sociaux et s'appuyer sur les recommandations de l'Agence nationale de l'évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux.

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Le contrôle des établissements et services sociaux et médico-sociaux et des lieux de vie et d'accueil est exercé par l'autorité qui a délivré l'autorisation (préfet, agence régionale de santé, conseil général). Quelle que soit l'autorité qui a délivré l'autorisation, le préfet peut, à tout moment, diligenter les contrôles. Il dispose à cette fin des moyens d'inspection et de contrôle de l'agence régionale de santé pour l'exercice de ses compétences.

Le calendrier des évaluations des établissements et services sociaux et médico-sociaux est revu. Les établissements et services rendent compte de la démarche d'évaluation interne engagée non plus tous les cinq ans, mais selon un rythme et des modalités fixés par décret. Par dérogation, les établissements et services autorisés et ouverts avant le 22 juillet 2009 communiquent les résultats d'au moins une évaluation interne dans un délai fixé par décret. Par ailleurs, les établissements et services sont tenus de procéder à deux évaluations externes entre la date de l'autorisation et le renouvellement de celle-ci. Le calendrier de ces évaluations est fixé par décret. Par dérogation, les établissements et services autorisés et ouverts avant le 22 juillet 2009 procèdent au moins à une évaluation externe au plus tard deux ans avant la date de renouvellement de leur autorisation. En cas de certification par des organismes certificateur, un décret détermine les conditions dans lesquelles cette certification peut être prise en compte dans le cadre de l'évaluation externe. Cette disposition entre en vigueur à compter du 1er janvier 2011.
La section IV de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie est désormais consacrée également au financement de la formation des aidants familiaux et des accueillants familiaux.

Au sein des établissements et services sociaux et médico-sociaux, lorsque les personnes ne disposent pas d'une autonomie suffisante pour prendre seules le traitement prescrit par un médecin à l'exclusion de tout autre, l'aide à la prise de ce traitement constitue une modalité d'accompagnement de la personne dans les actes de sa vie courante. L'aide à la prise des médicaments peut, à ce titre, être assurée par toute personne chargée de l'aide aux actes de la vie courante dès lors que le mode de prise ne présente ni difficulté d'administration ni apprentissage particulier. Le libellé de la prescription médicale permet, selon qu'il est fait ou non référence à la nécessité de l'intervention d'auxiliaires médicaux, de distinguer s'il s'agit ou non d'un acte de la vie courante. Des protocoles de soins sont élaborés avec l'équipe soignante afin que les personnes chargées de l'aide à la prise des médicaments soient informées des doses prescrites et du moment de la prise.
La loi introduit et définit la notion d'établissement et services sociaux et médico-sociaux privés d'intérêt collectif (art. L311-1 du CASF).

Avant le 30 juin 2010, le gouvernement remet au Parlement un rapport relatif à la mise en œuvre d'un service minimum dans le secteur médico-social. Ce rapport sera précédé d'une concertation approfondie avec les partenaires sociaux et les acteurs du secteur.

D'ici au 22 janvier 2010, un décret adapte les dispositions du CASF aux modalités de fonctionnement et de tarification de l'accueil temporaire des personnes âgées. Une évaluation du fonctionnement de ces établissements et services fait l'objet d'un rapport remis au Parlement avant le 15 octobre 2012.

Dans les établissements et services sociaux et médico-sociaux, à l'exception des foyers de jeunes travailleurs, gérés par des organismes de droit privé à but non lucratif, lorsque la situation financière fait apparaître un déséquilibre financier significatif et prolongé ou lorsque sont constatés des dysfonctionnements dans la gestion de ces établissements et de ces services, et sans préjudice des dispositions relatives au contrôle des établissements et services, l'autorité de tarification compétente adresse à la personne morale gestionnaire une injonction de remédier au déséquilibre financier ou aux dysfonctionnements constatés et de produire un plan de redressement adapté, dans un délai qu'elle fixe. Ce délai doit être raisonnable et adapté à l'objectif recherché. Les modalités de retour à l'équilibre financier donnent lieu à la signature d'un avenant au contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens. S'il n'est pas satisfait à l'injonction, ou en cas de refus de l'organisme gestionnaire de signer la convention susmentionnée, l'autorité de tarification compétente peut désigner un administrateur provisoire de l'établissement pour une durée qui ne peut être supérieure à six mois renouvelable une fois.

L'abrogation des articles du CSP relatifs au comité régional de l'organisation sanitaire interviendra six mois après l'entrée en vigueur du décret mettant en place la commission spécialisée de la conférence régionale de la santé et de l'autonomie compétente pour le secteur sanitaire et, au plus tard, le 1er décembre 2010.