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mercredi 25 février 2009

Fin de vie : reconquérir le territoire de la dignité

Près de dix ans après le vote, en juin 1999, de la première loi permettant le développement significatif des soins palliatifs, l'Assemblée Nationale vient d'adopter une proposition de loi tendant à créer une « allocation d'accompagnement de fin de vie ». Le régime envisagé vient en fait compléter un dispositif déjà existant, prévu par le code du travail, le congé de solidarité familiale, mais comporte l'immense mérite de mettre un terme à la dimension sacrificielle que devait endosser le bénéficiaire de ce dispositif, en devant renoncer à tout revenu pendant la période consacrée à l'accompagnement d'un proche dans ses derniers instants.

On pourra, certains ne s'en sont pas privés, minimiser la belle unanimité qui s'est organisée sur les bancs du Palais Bourbon en regrettant que la durée d'indemnisation envisagée ne soit pas plus longue, ou que le montant promis pour l'indemnité journalière reste faible. Mais après une décennie où les aspects médicaux ont seuls fait l'objet de toutes les attentions, il faut se féliciter que le législateur se décide de nouveau à explorer s'agissant du sujet de la fin de la vie autre chose que les pages du code de la santé publique. Le développement des soins palliatifs, certes encore inachevé, a permis que la douleur ne soit plus l'unique compagne de la mort. Elle ne devait pas demeurer remplacée, dans ce rôle, par la seule technique médicale, aussi enveloppée de psychologie et d'humanisme soit-elle.

Ce n'est qu'en faisant progressivement évoluer les représentations, les idées reçues du grand public, que nous serons en mesure de reconquérir le terrain de la dignité associée à la mort, dont se sont fait une exclusivité les tenants de l'euthanasie. Le sujet de la mort suscite nécessairement une importante émotion, mère d'une grande confusion des esprits : douleur et angoisse, acharnement thérapeutique et soins palliatifs finissent par s'y superposer sur un lit de culpabilité profonde.

Rendre sa place à l'affection

Parmi les valeurs qui restent à reconquérir, il y a celle de l'affection. Cela impose que l'accompagnement de la fin de la vie d'un proche cesse de relever de l'héroïsme, avec pour les membres de l'entourage le seul refuge, pour atténuer la culpabilité, de l'impérieuse nécessité de vivre pour ceux qui restent. L'auteur de ces lignes, qui exerce dans le monde des établissements pour personnes âgées, mesure régulièrement combien les derniers jours de nombreux vieillards sont habillés d'une immense solitude. La bonne volonté, l'augmentation des effectifs et du professionnalisme des personnels qui oeuvrent dans ces établissements ne suffisent pas à compenser, dans les derniers instants, la présence de ceux, de l'un de ceux au moins, dont l'existence a été la raison de vivre du mourant. A ce titre, et comme symbole d'une absence de réduction au soin de l'accompagnement qui est proposé aux personnes en fin de vie, on voudrait que soit rappelé que dans maison de retraite il y a le mot « maison ». On ne peut que souhaiter que la limitation aux personnes finissant leur vie à leur domicile de l'initiative généreuse de nos députés ne soit pas lue de manière trop restrictive, que les maisons de retraite figurent au nombre des domiciles où l'on peut choisir de mourir, de sa belle mort.

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