Santé, éthique et argent!
Le 28 juin 2007 il publie son avis n°101: «Santé, éthique et argent: les enjeux éthiques de la contrainte budgétaire sur les dépenses de santé en milieu hospitalier»
A l’heure ou le Gouvernement, prépare encore son projet de Loi «Hôpital, Patient, Santé, Territoire», je ne peux que vous inviter à a lecture de cet avis (http://www.ccne-ethique.fr/avis.php ) tellement les éléments qu’il contient semblent correspondre à de véritables réponses à un véritable problème.
Seulement voilà! La tarification à l’activité (T2A) de la médecine, de la chirurgie et de l’obstétrique (MCO) des hôpitaux,qui portait sur 50% de l’activité en 2007, est passée à 100% en 2008. En baissant artificiellement les tarifs des activités facturables le gouvernement plonge tous les hôpitaux dans le rouge.
Ce même gouvernement réfléchit aujourd’hui pour étendre cette mesure comptable à toutes les activités de soins et bientôt sociales, et bientôt psychiatriques, etc. etc. alors que tous les experts un peu sérieux, dont ce CCNE,recommandent exactement le contraire.
Pour qui gouverne-t-il?
…«Selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), une politique de santé équitable doit non seulement combattre la maladie, mais aussi assurer à la population un minimum de bien-être et d’épanouissement.Or notre pays présente le paradoxe de faire bénéficier ses habitants d’une espérance de vie parmi les plus élevées au monde, mais de compter en même temps des inégalités très importantes au plan sanitaire; «l’espérance de vie des personnes les plus défavorisées se rapproche en France de celle de certains pays du tiers monde»
Qui dit cela? “Manifeste contre la pauvreté” par Martin Hirsch et Jérôme Cordelier, Oh Editions, 2004, 180 p.
«De quoi parle-t-on d’ailleurs quand on parle de rentabilité de l’hôpital? Elle ne peut être évaluée comme celle d’une entreprise où les coûts sont équilibrés par les recettes provenant de la vente de biens ou de services. Les clients de cette entreprise sont à la fois capables de les acheter à leur prix véritable, et libres de les acquérir ou non; telle n’est manifestement pas la situation des usagers de l’hôpital.»…
«La préservation du bien commun «santé publique» ne peut pas être comptabilisée comme un «produit» ordinaire: elle est aussi la pierre angulaire d’un service public qui maintient un lien essentiel avec les citoyens; pour la société, le bénéfice de ce lien est inestimable. Son coût n’est d’ailleurs pas aussi exorbitant qu’on le croit au regard de cette mission fondamentale.»…
«Dans certains cas, une dépense initiale peut générer des économies substantielles …On a ainsi pu montrer qu’une prise en charge efficace de la douleur après certaines interventions chirurgicales orthopédiques permet, au prix d’un surcoût initial restant modique, d’améliorer le pronostic fonctionnel à long terme et la “consommation” médicale et kinésithérapeutique secondaire.»…
«Ainsi le manque de structures modernes et spécialisées des accidents vasculaires cérébraux, le faible nombre d’IRM (par rapport à d’autres pays européens) destinés à en faire le diagnostic précoce conduisent à un nombre élevé de patients dépendants, et donc à un bilan très lourd pour l’Assurance Maladie»…
«Il est donc important dans le domaine médical en France de consacrer davantage d’attention et de moyens à la prévention, qui a pris un grand retard dans notre pays.»…
«L’attribution de moyens financiers nouveaux était censée répondre aux besoins de Santé Publique considérés comme prioritaires et insuffisamment dotés comme par exemple les Plans Douleur, Cancer, Maladies Rares ou Alzheimer. Or quelles qu’aient été les bonnes intentions qui président à l’élaboration et à la mise en œuvre de ces plans, ils ont en fin de compte été mis à la charge des établissements hospitaliers et intégrés comme nouvelles dépenses, souvent sans contrepartie dans leurs budgets, donc aux dépens d’activités préexistantes.»…
«La tarification T2A récemment imposée comme nouveau mode réglementaire de tarification dans les hôpitaux publics et privés favorise la maîtrise des dépenses de santé pour des actes effectués dans des services spécialisés (cancérologie, cardiologie, immunologie…). En revanche, en privilégiant la comptabilisation des actes techniques au détriment de l’écoute ou d’examens cliniques longs et précis, elle conduit à considérer comme «non rentables» beaucoup de patients accueillis notamment en médecine générale, en psychiatrie, en gérontologie ou en pédiatrie, dont le coût réel de la prise en charge n’apparaît pas dans la grille de calcul.»…
«Enfin, le poids prépondérant dans les budgets hospitaliers du personnel de soin (près de 80% des sommes) limite évidemment les marges de manœuvre de l’hôpital. Cependant il n’est évidemment pas envisageable de chercher à résoudre les contraintes budgétaires du soin par une réduction d’effectifs de soignants déjà insuffisants,…»
D’adapter les échelles d’évaluation des activités en vue de traiter de manière appropriée les différentes missions de l’hôpital, et, dans ce but, de développer des modèles spécifiques pour chaque grand objectif: soins relevant d’actes techniques, soins relevant d’actions non instrumentales telles que Prévention, Education pour la Santé, accueil de tous les malades avec préservation de la solidarité et du lien social, enfin recherche et innovation, diagnostic et thérapeutique….
De s’assurer du maintien du lien social pour éviter que la personne ne sombre dans l’exclusion une fois le diagnostic fait et le traitement entrepris. Quelle logique est à l’œuvre, si le succès médical est suivi d’une mort sociale?...
D‘éviter d’affecter des systèmes de cotation (T2A) à des actes dispensés notamment en psychiatrie, en gérontologie, et en pédiatrie, où encore l’écoute et l’examen clinique approfondis... Devraient aussi être jugées selon des critères différents les autres missions de service public de l’hôpital, que la T2A n’est pas en mesure d’évaluer et donc de coter correctement….
«La question éthique posée par l’examen de la dimension économique du soin explore la tension entre l’autonomie et la solidarité, entre la liberté individuelle et le bien public. Cette tension ne peut recevoir de réponse que dans la recherche d’équité, c’est-à-dire dans la justice».
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