Compteur Global

samedi 12 décembre 2009

La prévention des risques professionnels : un investissement qui rapporte gros

Beaucoup d’idées reçues entourent encore la question de la prévention des risques professionnels. Nombreux sont ceux à penser encore que l’amélioration des conditions de travail est un luxe, et il faut bien avouer que le nombre grandissant de chômeurs reste un argument récurrent de quelques chefs d’entreprises qui y voient une niche de main d’œuvre disponible, flexible et remplaçable. Un salarié touché par une maladie professionnelle, un accident du travail, ou plus généralement un mal être au travail, va donc le plus souvent intérioriser sa souffrance par peur de perdre son emploi ou changer pour un poste dévalué. L’exemple récent de la vague de suicide chez France Télécom démontre qu’une telle problématique est tabou au sein des entreprises, il faut l’apparition de tels drames pour que les dirigeants prennent enfin conscience de l’enjeu des conditions de travail. Faut-il s’étonner que la campagne de prévention hâtive qui fait suite est jugée opportuniste et hypocrite par les salariés ?

Bien que le cas de France Télécom reste exceptionnel, le malaise est sans précédent et s’étend dans toutes les professions et toutes les classes sociales. Les maladies professionnelles les plus fréquentes, les troubles musculo-squelettiques (TMS), sont passées de 21 000 en 2002 à 32 500 en 20061. En ce qui concerne les risques psychosociaux, sujet d’actualité, un salarié européen sur quatre2 souffre de problèmes de santé lié au stress professionnel au point que le gouvernement Français en a fait une priorité.

Affirmons le tout de suite, si la prévention des maladies professionnelles représente un coût certain, une simple démonstration montre que cet investissement est largement amorti à long terme. A l’inverse, ignorer les conditions de travail devient pénalisant dans un contexte économique de plus en plus concurrentiel, avec des pénalités sociales de plus en plus fortes.

Les charges qui résultent des maladies professionnelles et des accidents du travail sont nombreuses, parfois insidieuses, mais ne manquent jamais de pénaliser les entreprises. Nous pouvons distinguer des coûts directement liés à l’apparition de ces événements. Tout d’abord les cotisations à la sécurité sociale dont toutes les entreprises doivent s’affranchir : par exemple un simple syndrome du canal carpien avec un taux d’incapacité permanente de 9% coûte 12 000€ sur 3 ans, une surdité de 35 décibels coûte 88 000€ sur 3 ans, ou encore un décès représente 600 000€3. Il faut encore ajouter à cela les frais d’hospitalisation, pharmaceutiques ou de transport, entre autres, à la charge de l’entreprise. Ensuite, une indemnisation supplémentaire du salarié n’est pas à exclure en cas de faute inexcusable de l’employeur.

Suite à ces importantes sanctions financières, il faut compter les nombreux coûts indirects. L’absentéisme tout d’abord : si un TMS aux genoux représente en moyenne 60 jours d’arrêt, l’épaule demande en moyenne 250 jours4. Il faut donc reporter ce manque de productivité sur les autres salariés, exposés, du coup, plus lourdement aux contraintes favorisant l’apparition d’accidents du travail et de maladies professionnelles. Les salariés qui n’avaient pas encore de problèmes particuliers, voient leur santé se dégrader. Les délais de production deviennent plus difficiles à respecter, en s’exposant ainsi à des pénalités de retard. Enfin, la pression temporelle amènera peut être l’entreprise à diminuer la qualité de ses produits ou de ses services. Une fois que le cercle vicieux s’installe, il se propage, et il faut une énergie et des moyens importants pour tenter, au moins, d’en limiter les effets.

En plus d’avoir inquiété ses collègues qui, peut être, ont maintenant peur de s’exposer aux même risques ; l’employé touché aura nécessairement un impact sur l’organisation. S’il n’a pas retrouvé toutes ses capacités physiques, il sera jugé inapte par le médecin du travail. Dans ce cas il faudra le replacer sur un poste adapté ou aménager son ancien poste de travail. Si l’employé retrouve toutes ses capacités, un aménagement physique et organisationnel sera de toute façon incontournable sous peine de voir réapparaître les mêmes contraintes qui auront les mêmes conséquences.

Enfin l’image de l’entreprise elle même est en jeu. Il y a bien sûr le sentiment d’appartenance à l’organisation, le niveau de satisfaction et d’investissement des salariés. Mais il faut aussi penser à l’opinion des clients. France Télécom a brutalement payé son manque de bienveillance en chutant de la 9e à la 29e place des entreprises préférées des Français en 4 mois5. Le contexte économique actuel change les comportements, l’éthique devient clairement un facteur de choix, au même critère que le respect de l’environnement, le respect des conditions de travail devient un enjeux majeur sur le marché.

Une dernière question importante concerne la productivité. Nous pourrions penser qu’améliorer les conditions de travail va la diminuer. Par exemple, nous sommes légitimement en mesure de penser que l’aménagement de pauses plus régulières dans le cadre de la prévention des TMS, afin de laisser un temps de récupération à l’organisme, va agir défavorablement sur la productivité. En réalité, il n’en est rien. Un opérateur qui se sent en confiance et en sécurité dans son travail, sera motivé, s’investira plus dans son travail, et donc il produira plus facilement et la qualité du produit sera supérieure. Ajoutons à cela que certains aménagements physiques et organisationnels feront sûrement gagner du temps.

La stratégie de Lisbonne, cadre d’action européen visant à développer l’économie et la cohésion sociale, a montré que la plupart des états les plus performants ont pu assurer un haut niveau de protection social.

La proportion qu’est en train de prendre les accidents du travail et les maladies professionnelles pousse la sécurité sociale à augmenter les pénalités financières des entreprises qui n’auront pas ou peu considérés les nombreux moyens de prévention des risques professionnels. Une culture de prévention, bien qu’onéreuse a priori, est bien plus économique à long terme que de subir les coûts directs et indirects d’une négligence. L’amélioration des conditions de travail est une goutte d’huile dans l’organisation qui en a souvent bien besoin, et cela consiste simplement à créer le meilleur contexte possible pour atteindre l’objectif souhaité.

Au regard des vagues de suicide qui touchent les grandes entreprises Françaises, il est toujours décevant de réagir lorsque des événements aussi malheureux ont survenu. Considérons maintenant la formidable opportunité d’abattre un tabou aussi puissant que pernicieux.

1Source : CNAMTS

2Chiffres 2005 de la Fondation européenne pour l’amélioration des conditions de vie et de travail

3Chiffres 2006, selon la CRAM Alsace Moselle

4Source : CRAM Pays de la Loire

5Baromètre d’image Postenak-Margerit / Ipsos, de juin 2009 à octobre 2009

1 commentaire:

  1. Formation professionnelle comment s’assurer qu’elle soit utile ?
    La situation économique et les pressions que subissent les équipes dans les entreprises mettent l’accent sur l’utilité des formations professionnelles.
    Plus question de partir en formation, pour sacrifier à une simple tradition.
    Comment faire en sorte que la formation soit le plus exploitable possible par celui qui la reçoit et finalement le plus profitable pour l’entreprise aussi ?
    Nombre de formations se contentent d’expliquer, de sensibiliser.
    C’est le cas des formations sur la méthode et la gestion du stress.
    Pour ma part je trouve que l’idée de faire passer les messages par une approche physique, est une idée intéressante.
    Il nous est tous arrivés de mémoriser autant par le geste que par la réflexion.
    C’est ce type d’approche qu’il faut promouvoir.

    je conseille donc aux DRH, aux salariés de regarder ce que propose ce groupe de formateurs qui a mis au point des formations en ce sens.
    www.doxygene.com

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